Le développement énergétique de l’Union Soviétique de 1917 à 1950

Fig. 1 : Les figures emblématiques de l’Union Soviétique

Comment combler très rapidement l’énorme retard industriel et énergétique de la Russie tsariste ? Les Soviets s’y attachent dès les années 1920, mais, au moment où les États-Unis tablent sur le pétrole, ils préfèrent jouer la carte du charbon, abondant et bon marché. Cette option a laissé des traces.


Des premières tonnes de houille extraites dans le Donbass (Donetsk) avant le 18ème siècle (Lire : L’énergie en Russie avant 1917), à l’ouverture de nouvelles mines au-delà de l’Oural avant et pendant la Deuxième Guerre mondiale, la production charbonnière soviétique a été multipliée par 1 000. Cette spectaculaire croissance résulte d’une industrialisation très volontariste mais aussi d’une préférence pour le charbon au détriment du pétrole pourtant en plein essor aux États-Unis et en Europe occidentale sur la base des techniques issues de la deuxième révolution industrielle de la fin du 19ème siècle. A l’origine de cette préférence, d’abord d’abondantes ressources.

 

1. Un stock en terre de fossiles solides considérable

Les géologues n’ont pas toujours soupçonné les richesses charbonnières de la Russie[1]. Dans l’inventaire du professeur Rogers publié en 1860, les surfaces supposées recouvrir des gisements de charbon en Russie étaient estimées à 100 square miles (259 km2), derrière l’Espagne (200), la Westphalie (380), la Bohème (400), la Belgique (510), la Prusse (960), la France (984), donc très loin de la Grande Bretagne (5 400), des possessions britanniques d’Amérique du Nord (7 530) et surtout des États-Unis (196 650). Moins d’un demi-siècle plus tard, en 1901, Ed. Lozé remonte la Russie d’Europe à 20 000 square miles, ce qui la situe au milieu du classement entre les États-Unis (335 000), suivis de la Chine (232 500), et la Belgique tombée en queue (500). Le progrès que constitue le  passage des surfaces aux volumes de ressources avec l’International Geological Congress (IGC) de 1913 ne profite pas à celles dites prouvées de la Russie évaluées à 0,1 milliard de tonnes (Gt) sur un total mondial de 716 dont 415 en Amérique du Nord et 274 en Europe occidentale, mais il rehausse sensiblement ses ressources probables comptées pour 234 Gt sur un total mondial de 6 681 Gt.

La World Power Conference de 1948 introduit un changement radical. Alors que globalement les ressources désormais classées en prouvées et probables ne s’éloignent pas beaucoup de celles de l’IGC de 1913, la part de l’Union Soviétique bondit à 45% des premières et 20% des secondes. Souvent critiquées par la suite, ces évaluations ne semblent pourtant pas absurdes. Même après un retour aux frontières de la Russie, les réserves de charbon, toutes catégories confondues (bitumineux, semi-bitumineux, lignites) s’élèveraient selon l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) en 2004 à 248 Gt, soit 27% du total mondial. La même année, le Bundesanstalt für Geowissenschaften und Rohstoffe (BGR) réduit ce volume à 156 Gt, soit 18%, mais attribue à la Russie 1 820 Gt de ressources, soit 45% de celles du monde (Lire : Charbon minéral : géologie, ressources et réserves).

Ces énormes volumes reflètent l’extrême variété des charbons russes dont l’échelonnement des formations, du primaire au tertiaire, correspond très approximativement à leur étalement d’ouest en est. A côté des grands bassins répertoriés (tableau 1), un grand nombre d’autres ont été identifiés au milieu des années 1980. Surtout depuis qu’elle a retrouvé son dynamisme, l’industrie russe a  mis à jour de nouvelles ressources, notamment dans le bassin du Kuznetsk où 700 Gt, dont 270 de cokéfiables, ont été identifiées jusqu’à 1800 mètres de profondeur[2].

 

Tableau  1 : Principaux bassins charbonniers dans les frontières de l’ancienne Union Soviétique

Localisation Age Superficie km2 Ressources accessibles Gt Mode d’exploitation Variété de charbon
Donetskiy 46°N, 34°E Carbonifère 4 100       34 Souterrain Bit. cok.
Podmoskovnyy 55°N, 35°E Carbonifère 8 000         5 Souterrain S-bit.
 Pechorskiy 68°N, 63°E Permien 1 400         7 Bit. cok.
Karagandinskiy 49°N, 73°E Carbonifère 1 500         7 Souterrain Bit. cok.
Ekibastuzskiy 52°N, 75°E Carbonifère    170         3 Surf. et souter Bit.
 Kuznetskiy 55°N, 87°E Carb, perm.. 1 000       42 30% surf Anthr à s-bit
Kansko-Achinskiy 56°N, 90°E Jurassique 3 000       67 Surf. Lignite et bit
 Irkutskiy 53°N, 102°E Jurassique 1 200         3 Surf. Tous types
 Lenskiy 65°N, 122°E Jur., crétacé    500         2 Surf. Bit. Cok.
 Yuzhno-Yakutskiy 57°N, 127°E Jurassique 1 200         1 Bit.
 Bureinskiy 57°N, 133°E Crétacé    400         1 Surf. Bit.

Source : World Coal Resources and Reserves, Concise guide to world coalfields. IEA Coal Research, 1983.

 

2. Extraire du charbon pour s’industrialiser

Outre son retard industriel, la Russie de 1916 sort exsangue de la Première Guerre mondiale : 4 millions de morts (autant que France, Allemagne et Angleterre réunies), une production industrielle tombée à 70 % de son niveau de 1913. Les campagnes où sont encore installés les quatre cinquièmes de la population survivent sur les bases d’une agriculture primitive et autarcique, mais les villes courent au désastre. Dans ce contexte, la révolution d’Octobre triomphe, liquide la féodalité et se propose d’instaurer un « capitalisme d’État » permettant de mettre la bourgeoisie au service de l’État ouvrier.

La guerre civile interrompt l’expérience au bout de huit mois et impose le « communisme de guerre » dont l’échec débouche, au printemps 1921, sur la Nouvelle Politique Économique (NEP) « qui ressuscite les petites entreprises industrielles et le petit commerce privé, avec l’intention avouée d’obtenir une augmentation générale de la production, l’intensification générale des échanges entre la ville et la compagne et, partant, un meilleur ravitaillement des villes »[3]. Globalement, l’expérience réussit dans l’agriculture et la petite industrie, mais pas dans la grande. Bien que les nationalisations de 1918 aient été assouplies, les entrepreneurs étrangers sont partis et les russes font plus que jamais défaut. Ce vide est particulièrement criant dans le secteur de l’énergie : charbon, pétrole et électricité. Dans ce contexte, l’État seul est capable de créer à une allure accélérée l’appareil de production sur lequel comptent les Soviets contraints de bâtir le socialisme dans un ensemble de pays, tous très en retard sur les pays capitalistes[4] (Figure 1).

Fig.1 : Construire une industrie socialiste

Ce qu’il  va réussir, en empruntant  des voies bien différentes de celles des pays capitalistes où  des entrepreneurs privés, attirés par des perspectives de profit,  investissent des capitaux dans l’extraction et la commercialisation du charbon. Est adoptée, sans aucune expérience préalable, la planification centralisée de la production qui a peu varié tout au long des 70 années qu’a duré l’Union Soviétique. Les objectifs fixés à l’industrie charbonnière ont cependant évolué en fonction de la disponibilité d’autres sources d’énergie et des conditions de l’exploitation charbonnière. Au cours d’une première période (1920-1940), le développement socialiste suppose une très forte croissance de la consommation d’énergie reposant presque exclusivement sur un charbon majoritairement extrait des bassins occidentaux, au premier rang desquels celui du Donbass (Donetsk). Puis l’invasion allemande contraint à de vastes transferts industriels vers l’est qui sont l’occasion de mettre en valeur de nouveaux gisements à partir desquels la croissance charbonnière repart de plus belle en 1945, mais dans un contexte de concurrence avec de nouvelles sources d’énergie, pétrole puis gaz naturel, qui contraignent l’industrie charbonnière à des adaptations d’autant plus difficiles qu’elle ne peut se défaire des   méthodes d’une planification de plus en plus obsolète.

 

3. Une industrie publique, monolithique et planifiée

Dès décembre 1917, est créé le Conseil suprême de l’économie nationale (VSNK), chargé d’organiser, coordonner et réguler toutes les activités économiques. Chacune d’entre elles, dont celle du charbon, y est représentée par un département qui deviendra plus tard un ministère[5]. Puis, sous la pression des évènements, les changements institutionnels s’accélèrent. Le 12 juin 1918,  un décret du Conseil des Commissaires du Peuple nationalise toutes les industries-clés. Une nouvelle organisation industrielle doit être installée pour remettre les mines de charbon en état de fonctionnement et en accroître la production au plus vite. Après une période de tâtonnements (économie de guerre, NEP, premier Plan quinquennal de 1928), l’industrie du charbon s’insère, comme toutes les autres industries de base, dans un dispositif que les autorités tenteront plusieurs fois de réformer, mais sans grands succès jusqu’à la perestroïka de la fin des années 1980 (Figure 2).

Fig .2 : Aleksei Stakharov, héros de l'industrie charbonnière

Les sièges d’extraction et leurs annexes (traitement de la houille, construction et maintenance du matériel) sont des établissements de taille variable selon les bassins miniers et les régions.  Ils revêtent la forme juridique d’associations territoriales et sont normalement réunis en combinats, « groupant l’ensemble des établissements dont l’activité est solidaire dans un domaine technique défini, à l’intérieur d’un secteur géographique »[6]. Par l’intermédiaire de trusts, ces combinats sont rattachés à des commissariats ou des directions dans chaque région, puis à un ministère du charbon à Moscou. A côté de cette organisation très verticale et hiérarchisée de l’industrie peuvent subsister des mines d’intérêt local. Ainsi dans le Donbass, avant la deuxième guerre mondiale, le Commissariat du peuple à l’industrie houillère (Narkomougol) disposait de plus de 300 grands sièges en activité à côté de 2 000 petites mines relevant d’autres Commissariats en charge de l’économie locale[7].

Grands combinats ou petites unités minières locales ne disposent d’aucune autonomie de gestion et ne peuvent donc être qualifiés d’entreprises qu’au sens de collectivités économiques. Objectifs de production, prix de vente du charbon ou prix d’achat des fournitures, investissements à réaliser et fonds dédiés à leur financement sont fixés par les représentants régionaux du ministère du charbon. Ce dernier élabore ces informations dans le cadre de Plans annuels et quinquennaux, à l’aide de balances physiques qui équilibrent ex-ante offre et demande de combustibles solides. La mise en cohérence des Plans, préparés techniquement par les Ministères, est l’affaire du Gosplan qui reçoit les orientations stratégiques du Conseil des Ministres et, à travers lui, du Politburo du Parti Communiste de l’URSS. Dans cet exercice, l’équilibre recherché s’exprime en quantités physiques. Les prix, construits sur la base des coûts moyens de production et de transport, n’ont que des fonctions auxiliaires : expression des éléments du Plan qui ne peuvent être quantifiés en volumes physiques (salaires, taxes, fonds d’amortissement) ; calcul d’un certain nombre de ratios indispensables au planificateur (capital/output ratio, par exemple) ; distribution des revenus. Ces prix ont pu s’établir durablement à un niveau inférieur à celui des coûts, sans aucun lien avec les prix des marchés internationaux, et ce sur des périodes de plusieurs années.

Dans une industrie, comme celle du charbon, où aucune mine ne ressemble à une autre, la centralisation des décisions a constamment nui à la qualité de la planification. En outre, dans leurs relations avec leurs fournisseurs, les houillères ont d’autant plus pâti du système de prix planifiés que ceux du charbon, produit stratégique, ont toujours été maintenus très bas.

Comment a évolué au cours du temps la place que ces institutions ont assignée au charbon dans l’approvisionnement énergétique de la Fédération et comment l’industrie charbonnière a-t-elle répondu aux injonctions des plans successifs ?

 

4. Les besoins d’énergie à satisfaire au cours des trois premiers Plans

« Dans le domaine de l’édification économique, les premières années du pouvoir des Soviets se sont déroulées sous le signe de la lutte pour le blé et les combustibles »[8]. Ces derniers sont vitaux à la fois pour affronter les rigueurs de l’hiver et pour assurer le redémarrage de l’économie. Parmi eux, le bois contribue pour plus de 50% à la consommation d’énergie de la Russie et des pays qui vont la rejoindre au sein de l’URSS, mais nul n’envisage de s’appuyer sur lui pour développer la nouvelle économie socialiste, d’autant que sa disponibilité commence à poser des problèmes dans les grandes agglomérations urbaines éloignées des zones forestières[9]. Pour pouvoir, en outre, mener à bien une électrification rapide dans le cadre du  Plan spécial dit Goelro élaboré dès 1921, un appui sur les sources fossiles est indispensable. Parmi elles, le charbon, est initialement la plus facile à mobiliser dans le cadre des trois premiers Plans qui démarrent en 1928, 1933 et 1938.

Au cours de chacun d’eux, la consommation totale d’énergie  croît au rythme annuel moyen de 17% puis de 7% et de 21%.  Cette très forte croissance, surtout comparée à celle des économies capitalistes souvent proche de zéro à la même époque, repose sur plusieurs déterminants. L’Union Soviétique part de très bas. En termes de consommation totale d’énergie ou de consommation d’électricité par habitant, elle est beaucoup plus proche de l’Asie ou de l’Afrique que de la Pologne, de  l’Europe occidentale et à fortiori des États-Unis (tableau 2).

 

Tableau 2 : Consommations comparées d’énergie et d’électricité en 1925

Consom. énergie (kec) Consom. électricité (kWh)
Monde   785 100
États-Unis 6 196 701
Europe occidentale 1 848 251
Pologne   805 115
Japon   515 138
Amérique latine   252   46
URSS   165   19
Asie   105   18
Afrique   100   16

Source : Darmstadter Joel (1971). Energy in the world economy.  Baltimore : The Johns Hopkins Press, 876 p. (pp. 652-691). Les Kec ou kilo equivalent charbon ont une valeur conventionnelle de 7 000 kcal.

Après les lourdes pertes des années 1913-1920, le pays a retrouvé au cours de deux décennies suivantes un taux d’accroissement démographique naturel (1,1%), double de celui des États-Unis et de l’Europe occidentale, qui s’accompagne  d’un très fort mouvement d’urbanisation. Entre 1926 et 1939, les districts de Moscou, Leningrad, Stalino ou Vorochilograd, les villes de la Volga (de Gorki à Stalingrad), les métropoles de Kiev et de Kharkov ont vu leur population augmenter de 50 à 100%, en partie sous l’effet de la collectivisation de l’agriculture qui contraint nombre de paysans à quitter la terre[10]. S’ajoutent les villes-usines, centres de colonisation de régions comme Komsomolsk, Alma-Ata ou Stalinabad, faites de cités monobloc. Pour y accueillir les nouveaux venus, les logements construits à la hâte sont moins bien isolés que les vieilles isbas des campagnes. Or dans un pays au climat rigoureux, comme l’est la plus grande partie de l’Union Soviétique, l’habitat doit être chauffé de nombreux mois de l’année, d’où des besoins de combustibles considérables que les grandes villes ne peuvent plus demander uniquement à l’exploitation forestière.

La forte croissance de la consommation d’énergie vient aussi du modèle d’industrialisation adopté qui privilégie les industries lourdes (sidérurgie, chimie, grosse mécanique). Ce choix était-il propre aux nouveaux gouvernants ou s’inscrivait-il dans un courant de pensée plus ancien ? La question est toujours en débat. Pour certains, il s’imposait dès lors que l’Union Soviétique, internationalement isolée, était contrainte de construire le socialisme dans un seul pays et donc de  produire seule toutes les machines indispensables au développement de tous les autres secteurs d’activité[11]. Il sera théorisé, notamment par Evgueni Preobrajenski, sous la forme d’une « accumulation primitive socialiste » seule susceptible de combler le retard de l’URSS sur les pays capitalistes[12]. Pour d’autres, l’idée d’un take off appuyé sur les industries lourdes n’était pas une idée uniquement soviétique. Elle remontait au premier essor industriel de la Russie des années 1890. Alain Besançon rappelle qu’à cette époque « la peur de l’industrialisation fait place à l’industrialomanie ». Le problème n’est plus d’accroître la demande paysanne pour élargir le marché mais de la réduire pour financer la construction d’industries lourdes (Figure 3). À défaut de main d’œuvre qualifiée dont manque le pays pour ce type d’industries, il sera fait appel aux technologies étrangères « ce qui explique la dimension énorme des installations industrielles russes. La technologie s’y appliquait mieux »[13].

Cette vision persiste-elle après la révolution d’Octobre ? Oui, répondent ceux qui se sont intéressés à la genèse des techniques soviétiques[14].  Rares, les ingénieurs et techniciens vont acquérir un pouvoir politique que les nouveaux dirigeants n’avaient pas l’intention de leur confier[15]. Mais, au cours des années 1920, il faut avant tout produire et donc se confier à « ceux qui savent », sans discuter le bien fondé des industries lourdes ou celui du gigantisme. « La technique décide de tout » proclament les responsables. Or les industries, qui forment l’ossature des premiers Plans quinquennaux, sont toutes de grosses consommatrices d’énergie. Lorsque quelques kilos de pétrole ou de charbon suffisent pour produire 1000 $ de textile ou de produits alimentaires, il en faut quelques centaines pour la même valeur d’acier, de ciment ou de chlore.

Ce n’est pas tout. Individuellement, chacune de ces industries consomme plus d’énergie que son homologue des pays capitalistes sous l’influence de plusieurs facteurs qui se conjuguent en URSS. Dans une économie centralement planifiée, seuls comptent les volumes produits. Peu importent les quantités de matières premières, énergétiques ou non énergétiques, absorbées par cette production. Pourquoi ce peu d’intérêt pour l’utilisation efficace des matières premières ? En partie, parce que riche en ressources naturelles, comme le sont d’ailleurs aussi les États-Unis, l’URSS ne se soucie pas de les économiser en recourant à des procédés techniques souvent plus compliqués et plus coûteux[16]. Mais marxisme et socialisme jouent aussi un rôle dans ce manque d’intérêt. Contrairement à ce que certains imaginent, Karl Marx ne s’est jamais distingué d’Adam Smith sur les fondements de l’économie que sont les droits des individus, essentiellement perçus comme des producteurs alimentant un cycle de production-échange-consommation, réputé indépendant aussi bien de la nature que des autres dimensions de la société[17]. Qui plus est, alors que le libéralisme a pu introduire quelques limites à la prédation des ressources naturelles par le mécanisme des prix ou les normes sociales, le socialisme s’est révélé hostile à toute avancée dans une direction jugée opposée au développement des forces productives. Résultat : bien que les données disponibles soient fragiles, il semble qu’au cours de cette première période, l’efficacité globale de conversion des sources primaires en énergie utile se soit dégradée, ce qui a contribué à élever le taux de croissance annuelle de la consommation primaire d’énergie[18].

 

5. Le charbon est préféré aux hydrocarbures

Comment les besoins énergétiques ont-ils été satisfaits ? Par de l’électricité et des combustibles, l’une et les autres essentiellement tirés du charbon, car les autres sources d’énergie primaires ont été peu mises à contribution (tableau 3).

 

Tableau  3 : Évolution de la structure de l’approvisionnement énergétique (1925-38)

Cons.totalen Mtec Charbon %

 

Pétrole % Gaz % Elect. prim. %
1925   25.3 64.9 34.2 0.7 0.1
1929   53.0 70.9 28.1 0.8 0.1
1933   98.6 72.9 25.5 1.5 0.1
1937 166.3 73.6 24.4 1.7 0.3
1938 176.3 73.1 24.9 1.7 0.4

Source : Darmstadter Joël. Energy, op. cit, p. 689. La biomasse est exclue de ces évaluations. Les Mtec ou million de tonnes d’équivalent charbon ont une valeur conventionnelle de 0,7.107 Kcal.

Au cours des trois premiers Plans quinquennaux, loin de croître comme dans les économies capitalistes à la même époque, la part du pétrole se réduit. Les planificateurs soviétiques paraissent mal à l’aise avec une source d’énergie initialement développée par des compagnies étrangères et destinée à l’exportation (Lire : L’énergie en Russie avant 1917). En 1928, son raffinage est toujours plus que sommaire puisque ses produits se limitent à du kérosène pour satisfaire les besoins d’éclairage, de cuisson et de chauffage ainsi qu’à de toutes petites quantités d’essence que les Soviétiques continuent d’exporter et à des fuels résiduels en grandes quantités. Au début des années 1930, les tracteurs, indispensables au développement de l’agriculture collectivisée amorceront des débouchés pour les carburants mais sans leur donner une impulsion comparable à celle des États-Unis car les 51 000 tracteurs construits en 1937 ont représenté moins de 20% de ceux fabriqués aux États-Unis (Figure 4). Ils seront relayés, quelques années plus tard, par les chars, les camions et les avions engagés dans la Grande Guerre patriotique[19]  mais jamais par les véhicules de transport routier car au cours des deux premiers Plans leur nombre  croitra très peu, de 2 000 au total à 27 000 voitures et 184 000 utilitaires (1938)[20].

Fig. 4 : La motorisation de l'agriculture

Les planificateurs soviétiques auraient-ils pu s’appuyer plus sur le pétrole et le gaz au lieu de jouer presque exclusivement la carte du charbon ? Certains observateurs du système énergétique soviétique ont pensé que oui. S’étonnant que la part des hydrocarbures ait décru entre 1925 et 1938, Robert W. Campbell a étudié minutieusement les débats entre planificateurs au cours des années 1930[21]. Les arguments techniques selon lesquels le pétrole devait être réservé aux seuls moteurs à combustion interne, ne l’ont pas convaincu, car les raffineries soviétiques disposaient de grands volumes de résidus utilisables en fours ou en chaudières. Il pense plutôt que les planificateurs n’ont pas joué la carte des fuels lourds parce que, dans cette hypothèse, la production de brut n’aurait pas suivi. En cause, la répugnance  à investir dans l’exploration pétrolière par crainte d’un risque très supérieur à celui rencontré dans l’industrie charbonnière. Quant au gaz naturel, les planificateurs savaient peu de choses à son sujet : « It was not wrong policy, but ignorance ». A quoi s’est sans doute ajoutée la difficile planification des déséquilibres spatiaux entre lieux de production (est) et de consommation (ouest). Robert W Campbell  déduit de cet examen que la réorientation en faveur des hydrocarbures au cours des années 1950 a probablement été influencée par la baisse des coûts relatifs du transport (chemin de fer et pipelines) par rapport aux coûts des matières premières.

Il n’a sans doute pas tord, mais son jugement semble quelque peu biaisé par une vision de la concurrence entre sources fossiles très connotée  États-Unis. Ce dernier pays a construit un marché domestique pour les produits pétroliers à une époque où la Russie exportait la quasi-totalité de sa production de brut. Il a commencé aussi à utiliser massivement le gaz (6,2% de sa consommation totale d’énergie en 1925), à une époque où il était à peu près le seul à le faire dans le monde. Même s’ils avaient porté plus d’intérêt à leurs ressources pétrolières et gazières, pourquoi les Soviétiques, dans la pénurie des années 1920 et 1930, auraient-ils investi dans de coûteux transports (gaz notamment) depuis le Caucase pour alimenter de gros usages sous chaudière pour lesquels le charbon convenait parfaitement ? En outre, ce dernier bénéficiait de techniques déjà bien maîtrisées par les Russes à partir de gisements beaucoup plus proches des grandes agglomérations et des grands centres industriels. Il se prêtait aussi parfaitement à l’alimentation des nombreuses centrales thermiques, construites dans le cadre du Plan Goelro (Figure 6).

Toutes ces évolutions favorables au charbon n’ont cependant pas conduit l’URSS à négliger totalement l’exploitation du pétrole. Après l’effondrement de sa production en 1918 (moins de 4 Mt), sa croissance reprend, d’abord lente jusqu’en 1925 (7 Mt) puis plus rapide (18,5 Mt en 1930 et 31 Mt en 1940), toujours très majoritairement  à partir des gisements du Caucase en Azerbeïdjan, soit ceux de Bakou, Grosnyi et Maïkop. Suite aux destructions de la guerre, il faudra attendre 1950 pour retrouver le niveau de production de 1940. Derrière la reprise, se profile  le déplacement des régions productrices : Volga-Oural ambitionne de devenir le Second Bakou[22]. C’est là, en effet que se sont concentrées les recherches au cours des années 1930.

 

6. De nouveaux bassins concurrencent celui du Donbass

De 1,016 Mt en 1913, la production de lignite a atteint 2,020 en 1920, mais celle de houille, tombée à cette date au cinquième de son niveau de 1913 (6,7 Mt), peine à remonter la pente. Après nationalisation des mines, l’extraction reprend au début des années 1920 dans tous les bassins connus à l’époque, mais elle se concentre sur celui du Donbass[23]. Partagé entre la République Socialiste Soviétique d’Ukraine (3/4 de la production) et celle de Russie (1/4), il restera de loin le plus important bassin de l’URSS jusqu’à la Deuxième Guerre Mondiale (tableau 4).

 

Tableau 4 : Évolution par bassin de la production soviétique

Mt Donbass Moscou Oural Autres  Ouest Kuznetsk Kanska-

chinsk

Kara-

ganda

Autres

Sibérie

URSS
1927   26   1   2   1     3   3   36
1932   44   3   3   2     7   1   5   65
1937   75   8   8   3   17   4 13 128
1940   94 10 12   4   22   6 18 166
1950   95 31 33   3   38   2 16 33 260

Sources : Soudopalov (p. 9) pour les années 1927-1940 ; Gordon (p. 53) pour les années 1940-75.

Comment les Soviétiques ont-ils multiplié par plus de trois l’extraction du Donbass au cours des années 1930 ? Le démarrage ne semble pas avoir été de tout repos si l’on en croit Martin Malia qui évoque un procès à grand spectacle intenté, au printemps de 1928, à quelques cinquante ingénieurs des mines de la région de Chakhty pour « sabotage au service du capital international ». Et d’ajouter que si l’affaire n’avait pas favorisé l’industrialisation, elle avait eu l’avantage « de montrer aux ouvriers que leur sort misérable était dû aux incessantes machinations des ennemis de classe »[24]. En 1940, le Donbass apporte encore 57% de la production soviétique mais il commence à être sérieusement concurrencé par d’autres bassins.

Dans la seule partie occidentale de l’Union Soviétique, les charbons des  régions de Moscou, Toula, Kalouga, Riazan et Smolensk se rapprochent des lignites, sont très humides et ont une forte teneur en cendre. Ce n’est donc pas leur qualité mais la proximité des lieux d’utilisation (chemins de fer, chauffage domestique, industrie du gaz manufacturé, centrales thermiques de Stalinogorsk, Chtchékino, Tchérépetz) qui a poussé au développement de leur exploitation, au cours des années 1930. Ce ne sont cependant pas eux, mais  le Kouzbass qui devient le grand rival du Donbass, tant sa richesse charbonnière est grande, en volume (450 Gt au moins) et en qualité (lignites, anthracites, cokéfiables). Revenue en 1920 à son niveau de 1913 (0,8 Mt), sa production dépasse les 20 Mt au début de la Grande Guerre Patriotique. Son activité est tirée par l’industrialisation accélérée des premiers Plans quinquennaux. Les premières grandes usines sidérurgiques ont été installées dans la région ukrainienne, mais cette localisation est jugée trop vulnérable, car trop proches des frontières occidentales de l’Union. D’où la priorité donnée au combinat Oural-Kouznetsk dès 1930. A une extrémité, les mines de fer de Magnitogorsk, à l’autre les houilles cokéfiables du triangle Kémérovo-Novosibirsk-Altaï. Entre les deux, des trains transportant sur 2000 km du minerai de fer et du charbon dans les deux sens puisque l’acier coule aussi bien dans l’Oural, dont les mines de charbon sont insuffisantes, que dans le Kouznetsk où l’usine Staline a commencé, en 1932, à fondre le minerai de fer de l’Oural[25].

La nouvelle industrie charbonnière soviétique avait démarré au début des années 1920 sur la base de très faibles productivités du travail, héritées des mines de l’époque tsariste et des destructions de la guerre, de la révolution et de ses suites. La forte croissance de la productivité moyenne de l’entre deux guerres, affichée par le Ministère de l’industrie houillère, parait donc assez vraisemblable : de 8,9 tonnes/mois par mineur à l’abattage, elle aurait grimpé à 27,2 en 1937 puis 32,3 en 1956. Sa croissance de 5% par an au cours du premier Plan quinquennal (1928-32) aurait plus que doublé au cours du deuxième (1933-37) grâce à la familiarisation des mineurs avec les nouveaux matériels mis à leur disposition. Les choses se gâtent cependant à partir de cette date, du fait de la guerre et de l’invasion allemande, bien sûr, mais aussi de celui « de l’écart existant entre le niveau de mécanisation des travaux d’une part, et les méthodes d’exploitation et les formes d’organisation de l’autre »[26].

L’invasion allemande contraint les Russes à évacuer vers l’Est des pans entiers de leur industrie. « De tous les faits importants qui ont marqué l’ascension vertigineuse (de l’industrialisation soviétique), aucun ne l’est davantage que le déplacement systématique et massif des installations industrielles au-delà des Ourals, à l’intérieur des territoires autrefois abandonnés de l’Asie centrale »[27]. Cette marche vers l’Est donne une impulsion décisive à l’ouverture de nouvelles exploitations charbonnières.  Au premier rang desquelles celles des montagnes de l’Oural. En dépit de nombreux affleurements, tant sur ses versants Est qu’Ouest, le massif est moins riche en combustible, notamment cokéfiable, qu’en minerais ferreux et non ferreux. De longue date, l’extraction et la transformation de ces derniers y avaient stimulé l’ouverture de mines de charbon. L’impulsion des premiers Plans quinquennaux axés sur les industries lourdes est accentuée par le transfert d’activités industrielles depuis les régions occidentales du pays à partir de 1941 (Figure 7).

Mais d’autres bassins sont beaucoup plus intéressants que ceux de l’Oural sous l’angle de leur richesse en charbons cokéfiables. La guerre profite notamment aux gisements du bassin de la Petchora situés dans le nord-est de la partie européenne de l’URSS, sur les frontières de la République Socialiste autonome de Komi et la région d’Arkhangelsk. Les gisements de Vorkouta et d’Inta, aux veines en plateures d’une puissance de 0,5 à 4,5 mètres, y ont été mis en exploitation dès que reliés, par la nouvelle voie ferrée Kotlas-Vorkouta, au reste du réseau soviétique. Par son intermédiaire, le charbon alimentera la région de Leningrad et la sidérurgie de Tchérépovetz (Cerepovec). D’où une croissance rapide de son extraction qui frôlera les 10 Mt au début des années 1950.

Le bassin du Kouzbass tire aussi un grand parti du déplacement vers l’est de l’industrie soviétique. Ses ressources sont majoritairement exploitées en souterrain, mais les découvertes (ciel ouvert) y représenteront environ 10% des volumes extraits à la fin de la guerre. D’où une croissance de la productivité bien supérieure à celle des bassins occidentaux.

 

7. Le charbon, principal support de l’électrification

La très basse consommation d’électricité par habitant de l’URSS en 1925 (tableau 2) illustre l’énorme retard de l’industrie de l’électricité en 1917. Avant la Révolution, « le courant électrique était employé en Russie pour actionner quelques tramways et quelques ateliers. Au total, la puissance des centrales ne dépassait pas 1 100 000 kW fournissant quelque 2 500 millions de kWh. La production était morcelée entre un très grand nombre de petites usines »[28].

La situation change avec le lancement en 1921 du plan Goelro qui vise un double objectif : généraliser la distribution de l’électricité dans les campagnes, les ateliers, les usines et les grandes villes et mettre en place des centrales électriques alimentées par des sources d’énergie régionales de façon à minimiser la longueur des transports de matières premières. De 500 GWh,  l’année de sa mise en route, la production d’électricité atteint 6 224 en 1929, 16 357  en 1933, 39 600 en 1938 et 90 900 en 1950, soit des taux annuels de croissance de 43, 22, 19 et 7 % (tableau 5).

Tableau 5 : Évolution de la production d’électricité 1925-1950

Production

totale (GWh)

Production

hydroélectrique (GWh)

Hydro/total (%) Consommation/habitant (kWh)
1925   2 925    251   9   19
1929   6 224     557   9   37
1933 16 357  1 163   7   91
1937 36 400  4 191 11 194
1938 39 600  5 091 13 208
1950 90 900 12 691 14 505

Source. Darmstadter Joël. Energy, op. cit, p. 650 et 665.

Bien qu’accrue de 50 % sur toute la période, la part de l’hydroélectricité ne dépasse jamais 15 % de la production totale, en partie parce que la filière est pénalisée par le gel hivernal. Elle n’est cependant pas négligée. La croissance de sa production au rythme annuel moyen de 17 % sur toute la période résulte de la réalisation des grands aménagements de la Volga et du Dniepr (Dnieprostroï), à faible dénivellation mais à gros débit, donc à puissances unitaires de 500 MW et plus. D’autres centrales de moindre taille sont aussi construites dans le Caucase, la Transcaucasie et l’Extrême Orient[29].

La quasi-totalité des nouvelles puissances installées est cependant  constituée de centrales thermiques qui fournissent de l’électricité mais aussi de la chaleur lorsqu’ elles sont implantées à proximité de grandes agglomérations. Près de Leningrad, la centrale de Doubrovka (150 MW), sur la haute et moyenne Volga, les usines d’Ivanovo (100 MW) et de Gorki (200 MW) brûlent de la tourbe. Dans le bassin du Donbass, les trois centrales de Zouevo, Chtérovka et Chakhty (600 MW), comme plusieurs centrales du Kouzbass,  absorbent le poussier des exploitations minières. Dans la région de Moscou, les combustibles sont du lignite et de la houille.  L’économie de combustible n’étant  pas un objectif de gestion, la consommation spécifique moyenne de ce parc thermoélectrique est élevée et ne diminue que lentement au fil du temps : en grammes de charbon à 7 000 kcal/kg, elle était encore de 597 kcal/kWh en 1940 et de 542 en 1950[30].

 


Notes et références

[1]  Jevons W. Stanley (1865). The coal question. An Inquiry Concerning the Progress of the Nation, and the Probable Exhaustion of our  Coal-mines. Third Edition, revised. New York : Augustus M. Kelley Publisher, 1965, 467 p   (pp. 322-328).
[2]  Aux dires du professeur Valentin P. Mazikin, premier vice gouverneur de la région de Kemerovo.
[3] Sternberg Fritz (1951). Le conflit du siècle. Capitalisme et socialisme à l’épreuve de l’histoire. Paris : Editions du Seuil, 1956, 670 p. (p. 319).
[4]  A savoir, outre la Russie elle-même, l’Ukraine (29.12.1920), la Biélorussie (16.01.1921), l’Azerbaïdjan (20.09.1920), la Géorgie (21.05.1921), l’Arménie (2.12.1921), ces trois dernières formant provisoirement la République fédérative de Transcaucasie. Du tout sortira l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques, le 2 décembre 1922. Elle sera rejointe par l’Ousbékie, la Turkménie en 1924 et la Tadjikie en 1929. Bruhat Jean (1954). Histoire de l’URSS. Paris : PUF, 136 p.
[5] Malia Martin (1995) . La tragédie soviétique. Histoire du socialisme en Russie. Paris : Editions du Seuil, 686 p. (p. 183).
[6]  George Pierre (1947). URSS. Haute Asie – Iran. Paris : PUF, 534 p. (p. 305).
[7] Soudoplatov A. (1958). L’industrie houillère de l’URSS. Moscou : Editions en langues étrangères, 161 p. (p. 10).
[8]  Soudoplatov A. L’industrie houillère, op. cit, p. 8.
[9]   « The population continues to be dependent on firewood for heating, and agriculture and rural industry still rely on it, as do other industries such as papermills, sawmills, and brickmaking plants in area where it is available locally ». Campbell Robert W (1968). The economics of Soviet Oil and Gas. Baltimore : The Johns Hopkins Press, 279 p (p. 3).
[10]  « Au cours des années trente, quelque 30 millions de paysans auront été déracinés et transférés dans les villes, ce qui constitue la plus grande et la plus rapide urbanisation de l’histoire ».  Malia Martin. La tragédie, op. cit, p. 282.
[11] « Transformer notre pays agraire en pays industriel, capable de produire par ses propres forces l’outillage nécessaire, voilà le fond, voilà la base de notre ligne générale ». Joseph Staline, 16ème congrès du PC de l’URSS, décembre 1929, in  Bruhat Jean. Histoire, op. cit, p. 79.
[12] Malia Martin. La tragédie, op. cit, p. 222.
[13]  Besançon Alain (1980). Présent soviétique et passé russe. Paris, Le livre de poche, 401 p (pp. 39-40).
[14]  Ce poids politique dans toutes les instances du Parti subsistera. « Est créé ainsi une intelligentsia de masse sur laquelle s’appuiera Khrouchtchev et ses successeurs. Entre les ingénieurs et les organes supérieurs du pouvoir politique se sont tissés des liens de complémentarité reposant sur une vision du monde convergente (l’action de l’homme sur la nature) et une confortation mutuelle dans la légitimation des pouvoirs respectifs ». Darmois Gilles et Mandagaran Bernard (1984). L’ingénieur au pays des Soviets. Culture Technique, 12, mars, pp. 255-263.
[15] Selon Martin Malia, à la fin des années 1920, les ingénieurs comme les nepmen, les spéculateurs et les spécialistes bourgeois n’étaient pas en odeur de sainteté auprès des dirigeants bolcheviques (op. cit, p. 268), un grand procès public avait même été dirigé en 1930 à l’encontre du « parti industriel des ingénieurs bourgeois » (p. 279), mais Staline finira par reconnaître que « le capital le plus précieux de tous est l’homme » si bien que les ingénieurs occuperont en 1935 le sommet de l’ordre social (p. 280).
[16] « Energy, along with other abundant natural resources, has historically been an important component of the material foundation of Soviet economic, political, and military power » et plus loin “The soviet economic system…is a growth machine designed to combine cheap natural resources with cheap labor to produce high national-income growth rates”. Hewett Edward  A (1984). Energy economics and foreign policy in the Soviet Union. Washington : The Brookings Institution, 228 p (p. 1).
[17] Bourg Dominique (1995). L’idéologie économique et les grands courants de la pensée écologiste. Science, société et environnement. Actes de l’Ecole d’été de Chamrousse, 28 août-8 septembre, 301 p (p. 67).
[18] Selon les estimations de Palmer Putnam, elle serait passée de 28% en 1918 à 22% en 1940, sous l’effet de la croissance des usages mécaniques (work) dont l’efficacité moyenne est très inférieure à celle des usages chaleur basse température (comfort heat) et haute température (process heat). Ce que l’auteur commente comme suit :  « About 1925, the tremendous program of industrialization began to get under way. The over-all efficiency curve…declined as industrialization increased because of the growth of the low-efficiency work component at the expense of the high efficiency of the domestic-heating component ». Putnam Palmer Cosslet (1953). Energy in the future. Princeton : D. Van Nostrand,556 p. (p. 437).
[19] Campbell Robert W. The economics, op. cit, pp. 157-180.
[20] Woytinsky W.S and E.S. World population and production. Trends and outlook. New York : The Twentieth Century Fund, 1268 p. (p. 1167).
[21]  Campbell Robert W. The economics, op. cit, pp. 10-13.
[22] Pierre George. URSS, op. cit. p. 315.
[23]   « Le bassin couvre 23 000 km2 ; il a la forme d’un triangle allongé dont la pointe est tournée vers l’Est et dont les sommets se situent approximativement à Kramatorsk, Vorochilovgrad et Stalino (Iouzovka). Dans sa plus grande longueur, il mesure 350 km et dans sa plus grande largeur 150. Le Carbonifère affleure au Centre : c’est la région du Vieux Donbass… ; à l’Ouest et à l’Est, il est masqué sous le Crétacé et le Tertiaire ; là se situent les régions plus récemment prospectées du Nouveau Donbass…Ce bassin jouit d’une très grande richesse en variétés houillères de tous usages. Il existe plus de 200 faciès houillers inclus dans deux étages, l’un du Carbonifère inférieur, l’autre du Permien supérieur ». George Pierre. URSS, op. cit, p. 309.
[24] Malia Martin. La tragédie, op. cit, p. 263.
[25]  George Pierre. URSS, op. cit, pp. 334-335.
[26] Soudopalov A. L’industrie, op. cit, p. 143
[27]  Mende Tibor (1954). Regards sur l’histoire de demain. Paris : Editions du Seuil, 172 p. (pp. 90-91).
[28] Pierre Georges. URSS, op. cit, p. 318.
[29] Certains de ces aménagements sont décrits avec précision par Pierre Georges in URSS, op. cit, pp. 319-322.

[30] Office Central de Statistiques (1957). L’économie nationale de l’URSS, Moscou, p. 61.

 


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