Précarité énergétique : comment la combattre ?

 La précarité énergétique est un enjeu du débat national sur la transition énergétique. Selon l’Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE), plus de 5,6 millions de ménages la vive tous les jours. À Grenoble, un Pôle Territorial de Coopération Économique a vu le jour et entreprend des actions innovantes pour lutter contre ce phénomène.


En France, plus de 5,6 millions de ménages sont dans une situation de précarité énergétique. La hausse du prix de l’énergie, la qualité du logement et les pratiques des ménages sont d’autant de facteurs qui expliquent un tel nombre. Lutter contre la précarité énergétique devient alors un enjeu majeur sur les trois plans du développement durable : le plan environnemental (dans un souci de valorisation des ressources et de limitation des impacts environnementaux), sociétal (satisfaction des besoins humains en termes de santé et de logement) et économique (développer le secteur d’activité).

 

1. La précarité énergétique : les clés pour mieux comprendre

L’idée qu’un accès difficile aux sources d’énergie est une grave composante de la pauvreté s’est diffusée au Royaume-Uni, au début des années 2000 sous la dénomination de Fuel Poverty. En France, le concept de précarité énergétique est récent. Une première définition en a été proposée au gouvernement en 2009 puis inscrite dans la loi datant du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement. [1] « Est en situation de précarité énergétique une personne qui éprouve dans son logement des difficultés particulières à disposer de la fourniture d’énergie nécessaire à la satisfaction de ses besoins élémentaires en raison de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’habitat. »

1.1. Les facteurs de la précarité énergétique

L’Observatoire national de la précarité énergétique (ONPE) dénombre quatre principaux facteurs de précarité énergétique[2] :

  • La qualité du logement et de l’équipement de chauffage

Fig. 1 : Etiquette énergétique d'un logement - Source : Christian LEGELAND (Own work) [Public domain], via Wikimedia Commons

En France, 60% des logements ont été construit avant 1975 année de l’entrée en vigueur de la première loi de réglementation thermique. Si cette dernière a fortement réduit la construction de logements énergivores, 30% d’entre eux ont une étiquette énergétique appartenant aux classes F et G, ce qui engendre une consommation d’énergie importante (Figure 1).

  • Le niveau de ressources des ménages

Le plus souvent, ce sont des ménages ayant de faibles revenus qui vivent dans de tels logements. Des rénovations coûteuses ne peuvent donc pas être réalisées sans aides financières, les ménages devant subvenir à leurs besoins primaires en priorité.

  • Le prix de l’énergie

Le prix de l’énergie, en augmentation ces dernières années, élève la charge de leur facture d’autant plus que leur consommation est importante. Les ménages se retrouvent alors face à une facture conséquente, pas toujours bien comprise.

  • Les pratiques des ménages

Mal ou pas du tout informés sur le fonctionnement du système de chauffage et peu initiés aux éco gestes, certains ménages ont des habitudes très énergivores qui n’améliorent en rien leur situation.

1.2. Les conséquences de la précarité

Les conséquence d’une situation de précarité énergétique sont nombreuses et peuvent prendre diverses formes[3].

On retrouve tout d’abord des conséquences financières : endettement, privations. Les ménages, pour faire face à des difficultés de paiement des factures puisent dans des budgets dédiés à d’autres besoins importants comme l’alimentation ou l’éducation. Ces privations ont des répercussions sur la santé de l’individu, sur sa vie sociale, sa vie professionnelle. Un ménage en situation de précarité énergétique peut développer un sentiment d’injustice et d’humiliation (recours aux aides) qui contribueront à dégrader ses relations avec le bailleur et le fournisseur d’énergie.

La précarité énergétique à aussi des conséquences techniques comme la détérioration du logement, qui peut nuire à la sécurité et à la santé du ménage. On constate enfin des conséquences environnementales : la précarité énergétique est en effet source de surconsommation et donc d’un fort gaspillage d’énergie.

1.3. Les indicateurs de la précarité

Du fait de sa définition complexe, évaluer le nombre de personnes touchées par la précarité énergétique est difficile. C’est pourquoi quatre indicateurs nationaux ont été créés par l’ONPE[4]. Parmi eux, trois ont une approche budgétaire du problème.

  • Le Taux d’effort énergétique (TEE)

C’est le rapport entre les dépenses énergétiques et les revenus du ménage. On considère qu’il y a situation de précarité énergétique lorsque les dépenses énergétiques représentent au moins 10% du revenu du ménage. Certains contestent cependant ce seuil calculé dans les années 1990 : au vue des données actuelles, il est évalué à 8,6%. De plus il ne permet pas de comptabiliser les personnes qui se privent de chauffage par exemple.

  • L’indicateur Bas Revenu Dépenses Élevées par unité de consommation [5] (BRDE/uc)

Il compare le « reste à vivre » (c’est-à-dire les revenus moins les dépenses énergétiques) par unité de consommation (UC) du ménage avec la médiane [6]. Si cet indice est inférieur à 60% de la médiane, les dépenses énergétiques ne sont pas soutenables pour le ménage.

  • L’indicateur Bas Revenu Dépenses Élevées m² (BRDE/m²)
Il compare les dépenses énergétiques par m² du ménage avec la médiane. Si les dépenses réelles sont supérieures à la médiane, les dépenses d’énergie ne sont pas soutenables par le ménage.

Un dernier indicateur a une approche plus « déclarative » car il est lié au sentiment de confort des personnes. Il s’agit de l’indicateur Froid (FR). La situation est préoccupante si le ménage déclare une sensation de froid pour une des sept raisons jugées significatives par l’Enquête nationale Logement (ENL).

En 2006, cet organisme a introduit pour la première fois les questions nécessaires à l’évaluation de ces indicateurs. La population questionnée diffère selon l’indicateur : le TEE et l’indicateur FR ne concernent que les ménages ayant un revenu par UC faible (les trois premiers déciles de la population, c’est-à-dire les 30% dont le revenu par UC est le plus faible). Les deux indicateurs BRDE ne concernent quant à eux que les ménages vivant sous le seuil de pauvreté, les étudiants étant exclus de l’échantillon puisque leurs revenus ne sont pas disponibles.

1.4. La précarité énergétique en France

Les ENL de 2006 et 2013 révèlent que la précarité énergétique a connu une forte hausse et ce pour tous les indicateurs sur cette période (Figure 2)[7].

Fig. 2 : Comparatif des résultats des ENL de 2013 et 2006 - Source : ENL 2013, étude CSTB/ADEME 2016

Les deux tableaux suivant regroupent quelques résultats de l’Enquête nationale Logement de 2013. On peut relever que quel que soit l’indicateur utilisé, le revenu brut moyen des personnes en situation de précarité énergétique est nettement inférieur à la moyenne nationale. Ces personnes vivent généralement seules et sont Françaises de naissance. On peut noter que les personnes les plus touchées ne sont pas les chômeurs mais des personnes ayant un emploi ou retraitées (Figure 3).

Plus de 70% des logements occupés par des ménages en situation de précarité énergétique ont été construit avant 1975. Ils sont pour la moitié d’entre eux des logements collectifs (Figure 4).

Fig. 3 : Caractéristique socio-économique des ménages en France métropolitaine - Source : ENL 2013, étude CSTB/ADEME 2016

Fig. 4 : Caractéristique des logements des ménages - Source : ENL 2013, étude CSTB/ADEME 2016

1.5. Les modes d’action contre la précarité énergétique

Pour lutter contre la précarité énergétique, les pouvoirs publics ont mis en place un ensemble de dispositifs pour aider les ménages, dispositifs qui peuvent être classés en trois grands groupes[8].

  • Les dispositifs d’accompagnement à la réalisation de travaux dans lesquels on trouve entre autre les Fonds sociaux d’aide aux travaux de maîtrise de l’énergie (FSATME) ou encore le programme Habiter mieux développé par l’Agence nationale de l’habitat (ANAH).
  • Les dispositifs financiers que sont l’Éco prêt à taux zéro, le micro crédit habitat, le crédit d’impôt transition énergétique.
  • Les dispositifs hors travaux : il s’agit des mesures d’Accompagnement social lié au logement (ASLL), des tarifs sociaux de l’énergie, ou encore du Service local d’intervention pour la maîtrise de l’énergie (SLIME) qui est un dispositif local destiné à repérer et à accompagner l’aide de conseil personnalisé aux ménages en situation de précarité énergétique.

Ces dispositifs mis en places à l’échelle nationale permettent d’aider certains ménages en situation de précarité énergétique. Ils seraient cependant beaucoup moins efficaces sans la mise en place de politiques territoriales qui ont aussi leurs avantages. En effet, si une politique nationale permet de se donner les outils utiles dans la lutte contre la précarité énergétique, les politiques territoriales permettent quant à elles de fournir aux ménages une aide de proximité, donc plus efficace. Elles permettent une meilleure compréhension du phénomène et peuvent tirer au mieux profit des atouts de la région.

Certains ménages qui n’ont pas recours aux aides ont souvent une mauvaise connaissance des dispositifs mis à leur disposition, veulent se débrouiller autrement ou ne veulent pas dépendre d’aides sociales. Une approche locale permet d’identifier plus facilement ces ménages et de créer une relation de confiance. Les politiques territoriales sont donc essentielles pour une lutte nationale contre la précarité énergétique.

 

2. Un acteur majeur de la lutte contre la précarité énergétique dans le bassin Grenoblois : Ulisse

La mise en œuvre des mesures de lutte contre la précarité énergétique varie selon les territoires. Sur celui du bassin grenoblois, elle a bénéficié de multiples innovations organisationnelles.

2.1. L’Union locale des initiatives solidaires au service de l’emploi (ULISSE)

Le groupe Ulisse est une association (loi 1901) regroupant cinq entreprises membres[9] : Ulisse Grenoble solidarité, Ulisse Solidura, Ulisse Services, Ulisse Énergie et Ulisse Intérim (Figure 5). Ayant pour objectif premier de favoriser l’accès à l’emploi de personnes engagées dans un processus d’insertion sociale et professionnelle, le groupe participe activement au développement socio-économique du bassin Grenoblois.

Fig. 5 : Nomenclature du groupe Ulisse - Source : Site Ulisse

La forte implication du groupe dans le bassin Grenoblois commence en 1985 avec la mise en place par un élu municipal (M. Bruno Dardelet), d’un premier atelier et chantier d’insertion Grenoble Solidarité. L’association intermédiaire Emploi 38 est ensuite créée en 1990, de nouvelles branches apparaissent par la suite comme celle de service à domicile en 1995. En 2000, l’ensemblier Ulisse naît du regroupement de ces associations. C’est finalement en 2012 que sera structuré le groupe économique solidaire Ulisse. Par la suite, de nouvelles structures seront créées ou intégrées comme Ulisse Énergie en 2014 et dernièrement Ulisse Solidura en 2017.

L’objectif principal du groupe est de favoriser l’accès à l’emploi des personnes en situation précaire[10]. L’accompagnement de ces personnes se fait au travers de mises en situation de travail dans l’une des filières métier du groupe (clientèle, biens et services, formation, conseil et accompagnement). Pendant une période de deux ans (maximum), elles sont employées par Ulisse et bénéficient d’un accompagnement socio-professionnel pour développer et valoriser leurs compétences. L’objectif étant que ces personnes soient au minimum en situation d’autonomie à la sortie, ou au mieux embauchées en contrat à durée indéterminée (CDI) par une entreprise. Depuis la création d’ULISSE, environ 6500 personnes ont été bénéficiaire d’un tel parcours d’insertion.

 

3. Ulisse Énergie : une entreprise innovante en matière de lutte contre la précarité énergétique

Ulisse Énergie est une Entreprise d’insertion[11] innovante de par le service de conseil en énergie (Soleni) qu’elle propose. Sa création s’est déroulée en trois phases : une phase d’émergence de 2010 à 2011, une phase d’expérimentation de 2011 à 2012 et une phase de consolidation de 2012 à 2014. En 2017, l’entreprise est constituée de cinq employés. Depuis sa création, une vingtaine de personnes ont bénéficié d’un parcours d’insertion au sein d’Ulisse Énergie et 820 familles iséroises ont été accompagnées par Ulisse Énergie dans le cadre du service SOLENI.

3.1. SOLENI : un service de conseil énergétique innovant

Imaginé par M. Jean Jérome Calvier, Soleni est un service innovant de par ses méthodes d’intervention. Il propose un accompagnement de familles en situation en précarité énergétique. Les missions de Soleni consistent à réaliser un diagnostic sociotechnique (c’est-à-dire aussi bien sur les usages que sur le matériel) des ménages puis de leur donner des clés pour qu’ils puissent sortir de la précarité énergétique. Les ménages en difficultés sont en général signalés par les travailleurs sociaux, les bailleurs d’Habitations à loyer modéré (HLM) ou les fournisseurs d’énergie. Souvent les familles rencontrées ont des niveaux de revenu légèrement trop élevés pour bénéficier des dispositifs mis en place par l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), mais pas assez pour pouvoir entreprendre eux-mêmes de tels travaux.

Après avoir signé une convention de partenariat avec les acteurs que sont les bailleurs sociaux, les collectivités, les fournisseurs d’énergie ou autres, l’accompagnement des familles concernées peut débuter. L’intervention de Soleni se déroule en deux visites.

Lors du premier rendez-vous, les deux intervenants de Soleni (l’intervention se déroule toujours en binôme) décomposent les factures (gaz, eau, électricité) avec la famille, et identifient les mesures qui peuvent être mise en place rapidement et facilement. Ils effectuent ensuite une série de mesures pour réaliser un diagnostic du logement. Les données prélevées lors du diagnostic technique sont insérées dans un logiciel spécifique développé afin de faciliter la saisie et la rédaction de rapport dans le cadre des audits. L’application génère rapidement des graphiques qui rendent les résultats plus compréhensibles, donc plus facilement accessibles à partir d’un appareil nomade utilisé pendant les visites.

Lors de la seconde visite, les intervenants donnent des conseils personnalisés simples et efficaces dans le but d’améliorer la lisibilité des factures. Pour faciliter un cercle vertueux, ils apportent aussi un kit dont le contenu est adapté aux besoins de la famille. Ce kit contient notamment  des ampoules basses consommation, des réducteurs de débit d’eau ou encore des joints de calfeutrage. Ils serviront à l’élaboration de petits travaux dans la résidence de la famille. Ulisse Énergie ne disposant pas des équipements et de l’accompagnement financier nécessaires à la rénovation d’une chaudière par exemple, l’intervention sur de plus gros travaux est donc très difficile. Les petits travaux de confort thermique permettent néanmoins d’améliorer les conditions de vie de la famille. En outre, le rôle de Soleni est aussi de mettre en relation la famille avec des dispositifs d’aide adaptés dont l’existence est souvent ignorée et d’établir un lien de confiance entre les deux parties. Dans certains cas, l’objectif est aussi de faire des préconisations au propriétaire en matière de priorisation des travaux de rénovation thermique à engager dans le logement.

3.2. Des résultats convaincants

Les ménages ayant eu recours aux services proposés par Soleni enregistrent une baisse de consommation d’électricité de 15 à 20% en moyenne. On constate par ailleurs, une diminution moyenne de 21 % de la consommation en eau soit une économie d’environ 30 euros par an. La plupart des familles, considérant que les intervenants sont clairs dans leurs explications, proches et à l’écoute, appliquent les conseils et les transmettent les bons gestes à leur entourage.[12].

De tels résultats peuvent s’expliquer par différents facteurs de réussite.

Les personnes qui interviennent dans les ménages ont une expérience de la précarité : elles étaient dans la même situation que les familles et sont en train d’en sortir, elles ont, pour beaucoup d’entre elles, déjà eu des enfants et connaissent les difficultés rencontrées. Elles savent donc mieux écouter et comprendre les familles qui, du coup, se sentent plus en confiance. Cette proximité est donc très importante pour des ménages en situations précaires.

La considération du vecteur social est aussi un élément très important du diagnostic : la notion de fierté (avoir un grand frigo ou une grande télévision, par exemple) peut entrer en ligne de compte dans les choix que le ménage va faire. Ce sont des vecteurs de liens sociaux qui sont très importants pour les familles. L’équipe intervenante se contente de redonner le pouvoir d’agir aux familles et attache une importance toute particulière à ne pas émettre de jugement.

3.3. De grands enjeux

Nombre de grandes entreprises performantes développent de gros outils qui ne sont pas adaptés aux familles en situation de précarité énergétique. Un des buts que s’est fixé Ulisse Énergie est de faire prendre conscience à ces entreprises que les particuliers à revenus modestes sont un marché extrêmement important et économiquement très intéressant. C’est pourquoi Ulisse est un membre fondateur du Pôle Alpen.

 

4. ALPEN : un Pôle territorial de coopération économique (PTCE)

Un PTCE est un groupement d’acteurs (entreprises, chercheurs, collectivités locales et autres) dont l’objectif principal est de dynamiser le territoire sur lequel ses membres sont ancrés en favorisant l’essor de projets d’économie sociale et solidaire innovants. Les acteurs d’un PTCE coopèrent et développent ensemble des projets économiques qui auront un fort impact au niveau local. La France compte une centaine de PTCE qui revêtent principalement deux formes :

– des PTCE implantés sur un territoire très ciblé qui sont des pôles plutôt généralistes,

– des pôles concernant une filière métier particulière qui ont une activité dans un milieu précis comme l’agroalimentaire, la gestion des déchets ou ici l’énergie.

4.1. Un PTCE unique en France

Le Pôle Alpen est pour l’instant le seul PTCE dans le milieu de l’énergie. Ce n’est pas par hasard qu’il se soit développé à Grenoble. La région est historiquement très impliquée sur ce terrain et concentre nombre d’entreprises dans le secteur de l’énergie. L’endroit était donc idéal pour la création d’un tel PTCE.

Parmi les membres actifs du pôle, on retrouve de grandes entreprises :

Gaz Électricité de Grenoble (GEG) et Schneider Electric. Des collectivités : Grenoble Alpes Métropole et la ville de Grenoble. Et des entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) : le groupe Ulisse et des centres d’hébergement et de réinsertion sociale (Relais Ozanam et Oiseau Bleu).

Le pôle comporte aussi une multitude de membres associés et partenaires[13].

Membres associés et membres partenaires du Pôle Alpen

Établissements publics

Entreprise de l’ESS

Autres entreprises

Collectivités

. CCAS de Grenoble

.Institut d’étude politique (IEP) Grenoble

. Enactus ENSE3

.Planète Entrepreneurs

.institut négaWatt

. Cabestan

.UMIJ

.Compagnons Bâtisseurs

. InnoVales

.IDEAS Laboratory

. EDF

. REXEL

. Inoveha

.Point P

. Leroy Merlin

. SAMSE

. Hydrao

. Département Isère

. Région Rhône Alpes

 

Depuis sa création en 2014 une personne employée à temps plein en tant que chargée d’animation coordonne les actions entre les membres du Pôle.

4.2. Mode d’action, objectifs majeurs

Le Pôle Alpen permet de croiser les regards des grandes entreprises avec ceux des travailleurs sociaux, des techniciens de Grenoble Alpes Métropole et des chercheurs. Cette juxtaposition de points de vue différents permet de trouver des solutions que chacun aurait été incapable de trouver séparément. Les actions du pôle répondent à plusieurs critères : elles intègrent toutes au moins une structure de l’économie sociale et solidaire et doivent avoir un impact réel ou indirect sur la création d’emploi ou sur l’augmentation des compétences.

Depuis sa création, huit programmes d’action ont été mis en place. L’accompagnement d’un Centre d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) et de gens du voyage hébergés provisoirement dans des chalets en bois très énergivores sont deux d’entre eux. Une autre action qui illustre bien le principe de fonctionnement d’un PTCE est la triple offre proposée aux bailleurs d’HLM :

  • déposer les vieux radiateurs des logements et installer le matériel économe d’une entreprise;
  • piloter les radiateurs en installant le système développé par une autre entreprise qui permet le pilotage et le suivi de la consommation.
  • accompagner les ménages et leur expliquer le fonctionnement des radiateurs afin que les familles sachent s’en servir, une meilleure connaissance du système évitant une utilisation inadaptée du matériel, donc un rendement plus élevé.

4.3. Économie du PTCE Alpen

Les interventions SOLENI dans les logements sont gratuites. Leur coût réel s’élève à environ 500 euros par accompagnement, du fait notamment de l’intervention d’un binôme de salariés. Ces frais sont payés :

  • soit par la collectivité qui porte le service social ayant orienté les ménages, c’est-à-dire une commune ou Grenoble Alpe Métropole ;
  • soit par les bailleurs sociaux via leur service contentieux : les familles préférant payer leurs factures de consommation d’énergie en priorité, le paiement du loyer passe en second ce qui s’avère très coûteux pour les bailleurs sociaux, lesquels peuvent avoir intérêt à financer de tels services qui permettront d’éviter les impayés ;
  • soit par le service contentieux du fournisseur d’énergie.

Le développement du Pôle Alpen se déroule en deux phases. Les trois premières années correspondent à la phase de lancement et de consolidation. Le poste est financé à 100% par les collectivités locales c’est-à -dire par la région et par Grenoble Alpes Métropole. Cette phase s’arrête fin 2017. La phase suivante est la phase d’autofinancement qui comportera :

  • la création de coopérations pour créer des produits et des services ;
  • la création d’activités économique nouvelles générant un chiffre d’affaire sur lequel sera prélevé une commission pour le pôle ;
  • les nouvelles activités créées qui génèreront des emplois d’insertion.

En phase d’autofinancement, l’installation de nouveaux radiateurs dans des logements HLM constitue un bon exemple de l’action du Pôle. Des bailleurs HLM contactent Ulisse Énergie qui leur propose d’installer les nouveaux radiateurs économes d’une start-up et le système de suivi de consommation d’une grande entreprise. Ce sont les employés temporaires d’Ulisse, une fois formés, qui se chargeront de réaliser les travaux d’installation dans les logements, les salariés d’Ulisse Énergie réalisant le suivi des familles. Le but final est la création d’un cercle vertueux : des personnes en situations précaires sont embauchées par Ulisse qui augmentera leur niveau de compétence, la start-up génèrera du chiffre d’affaire, pourra se développer et ainsi créer des emplois. Les employés formés par Ulisse pourront être embauchés plus tard par une entreprise et les familles dont les logements auront bénéficié de ces nouvelles installations disposeront des clés pour sortir de la précarité énergétique. La phase d’autofinancement serait assurée par le fait qu’une part du chiffre d’affaire généré servirait au financement du Pôle, une sorte de commission qu’Ulisse recevrait de l’entreprise.

 

5. Perspectives d’avenir

Pour Ulisse Énergie, l’un des objectifs est de développer le service Soleni sur d’autres territoires : en 2017, Ulisse Énergie s’associe avec Entrepreneurs Solidaire du Centre Isère, un autre PTCE Isèrois pour le déployer sur le territoire du Voironnais. Il s’agit de s’assurer que le cahier des charges de Soleni est bien transmis. Le cahier des charges est en effet très strict quant à l’état d’esprit d’un tel organisme. Les clés du succès que sont la neutralité des intervenants et l’égalité entre les intervenants et les familles nécessitent une vigilance constante.

Pour le Pôle Alpen, relever le défi du changement économique est le but principal à court terme. Pour passer d’un financement public à l’autofinancement, le volume d’affaire généré doit augmenter, le poste de chargé de mission qui est primordial dans le fonctionnement du Pôle pourra ainsi être maintenu. Faire prendre conscience aux membres du Pôle Alpen qu’ils sont tous acteurs et qu’ils peuvent prendre des initiatives est l’une des ambitions d’Ulisse. Cette prise de conscience permettra aux entreprises de décider spontanément de coopérer entre elles. Le but étant de rendre le Pôle moins dépendant du chargé de mission employé par Ulisse.

 


Notes et références

[1] Article 11 Loi n° 2010-788 du 12 Juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.docidTexte=JORFTEXT000022470434&categorieLien=id

(https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000022470434)

[2] Étude de l’ONPE : Les chiffres clés de la précarité énergétique Édition n°2 Novembre 2016 : http://onpe.org/sites/default/files/pdf/tableau_de_bord/chiffres-cles-precarite-energetique-novembre2016.pdf

[3] Publication sur le site du Réseau des Acteurs de la Pauvreté et de la Précarité Énergétique dans le Logement (RAPPEL). http://www.precarite-energie.org/-La-precarite-energetique-.html

[4] Synthèse de l’ADEME : La précarité énergétique à la lumière de l’Enquête Nationale Logement 2013. http://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/precarite-energetique-lumiere-enl-2013-synthese.pdf

[5] L’Unité de Consommation (UC) est un système de pondération attribuant un coefficient à chaque membre du ménage afin de pouvoir comparer les niveaux de vie entre différents ménages.

[6] une valeur m qui permet de couper l’ensemble des valeurs en deux parties égales : 50 % des valeurs sont inférieure à m et 50 % sont supérieures à m.

[7] Pour une analyse plus poussée des résultats : Analyse de la précarité énergétique à la lumière de l’Enquête Nationale Logement (ENL) 2013 de Charles‐André BERNARD et Olivier TEISSIER http://www.onpe.org/sites/default/files/pdf/ONPE/onpe_cstb_indicateurs_pe_enl_2013.pdf

[8] Pour plus d’informations : http://www.planbatimentdurable.fr/IMG/pdf/GUIDE_PRECARITE_RAPPEL_18_JUIL_2016.pdf

[9] Structure d’Ulisse sur leur site : http://www.ulisse38.com/7323-le-groupe.htm

[10] Présentation du groupe Ulisse sur leur site : http://www.ulisse38.com/8060-presentation-generale.htm

[11] En savoir plus sur les EI : http://www.ulisse38.com/7428-en-savoir-plus.htm#par85934

[12] Synthèse de la mesure d’impact de SOLENI réalisée par Planète d’Entrepreneur sur une 50aine de ménage. http://www.precarite-energie.org/IMG/pdf/Mesure_Impact_SOLENI_2014_Juillet.pdf

[13] Fiche descriptive du Pôle Alpen. http://www.lelabo-ess.org/IMG/pdf/38_ptce__ptce_alpen_fiche_descriptive_150915.pdf

 


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