Électricité : La vente au coût marginal

Depuis la libéralisation des industries et marchés de l’électricité à partir des dernières années du 20ème siècle, les principes de fixation du prix de cette marchandise très spéciale sont toujours débattus. Bien que formulés il y a plus d’un demi-siècle, ceux développés par Marcel Boiteux ne doivent pas être perdus de vue.


La vente au coût marginal a fait l’objet, au cours des dernières années, de nombreux échanges de vue, notamment lors de réunions du Comité d’études de tarification de l’Union des producteurs et distributeurs d’énergie électrique (UNIPEDE). Cette année encore, l’Institut d’économie énergétique de l’université de Cologne y a consacré une partie des séances de son huitième congrès.

Poursuivant des travaux entrepris depuis déjà quelques années, les auteurs des rapports présentés ont abordé des questions qui pénètrent assez avant dans la technique marginaliste, sans s’appesantir à nouveau sur les bases même de la théorie. Il semble que certains malentendus aient pu naître, de ce fait, dans la pensée de ceux à qui les fondements du marginalisme n’étaient pas familiers. C’est pourquoi, quitte à simplifier à l’extrême, nous voudrions ici revenir aux principes : sous sa forme la plus simple et la plus générale, la vente au coût marginal repose sur quelques idées de bons sens qui ne devraient pas prêter à confusion.

Pourquoi vendre au prix de revient ? Pourquoi, plus précisément, au prix de revient marginal ? De quel coût marginal s’agit-il ? Tels sont les trois thèmes que nous voudrions développer dans ce bref article.

 

1. Pourquoi vendre au prix de revient ?

Précisons tout d’abord que ce n’est pas à l’existence d’une marge bénéficiaire que nous voulons faire allusion en évoquant la vente au prix de revient. Pourvu qu’elle reste raisonnable — et nul ne songerait à soutenir que les marges bénéficiaires se doivent d’être déraisonnables — la marge bénéficiaire correspond à la rémunération des capitaux engagés dans l’affaire, et à la rétribution de ses dirigeants ; à ce titre elle constitue un élément du prix de revient, au sens où nous l’entendons ici, tout comme les salaires — rémunération du personnel de l’entreprise — ou les charges financières — rémunération des obligataires et autres créanciers. Sans doute pourrait-on discuter de ce qu’est une rémunération normale du capital et des dirigeants de l’entreprise ; mais on peut tout aussi bien discuter du niveau normal des salaires ou de celui du taux de l’intérêt… ; au surplus, tel n’est pas ici notre objet.

Admettant qu’on ait décidé de ce qu’est le prix de revient au sens large qu’on vient de définir, le problème posé est de savoir si l’on est fondé à vendre au-dessous du prix de revient à certains consommateurs, pour vendre au-dessus du prix de revient à d’autres, ou s’il importe de vendre à tous au prix de revient.

Gouverner c’est choisir, dit-on. Cet adage vaut aussi bien pour le chef d’entreprise que pour les Conseils des gouvernements. La vie du chef d’entreprise est faite de choix quotidiens ; parmi ceux-ci, les choix qui portent sur les éléments économiques de son activité sont orientés par les coûts : à service rendu égal, le chef d’entreprise choisit la solution la moins coûteuse.

Si les prix des fournitures dont il envisage l’emploi, notamment celui de l’électricité, sont égaux aux coûts de revient de leur production, la solution la moins coûteuse pour lui est également celle qui est la moins coûteuse pour la collectivité. Sinon la solution la moins coûteuse pour l’entreprise peut être lune solution onéreuse pour le pays, de sorte que le chef d’entreprise sera conduit à adopter, quel que puisse être son souci de l’intérêt national, une attitude néfaste à la collectivité.

Les exemples de tels faux choix ne manquent pas. La concurrence Rail-Route en fournit quelques illustrations saisissantes : traditionnellement fondée sur la valeur d’usage du transport, et non moins traditionnellement péréquée suivant les relations, la tarification des chemins de fer conduit, dans nombre de pays, à des prix trop élevés pour les transports de produits finis sur les relations à grand trafic. La conséquence en est que les transports routiers, plus avantageux pour le client, absorbent, le long de ces lignes, une part du trafic que le Rail serait en mesure d’assurer à moindres frais. Dans le cadre de notre industrie, le chauffe-eau à accumulation est souvent supplanté par le chauffe-bain à gaz dans les villes où n’existe pas, pour l’énergie électrique, un tarif d’heures creuses adapté au coût particulièrement bas de l’énergie de nuit ; nombre de consommateurs sont ainsi conduits à opter, sans le vouloir, pour une forme d’énergie qui peut n’être pas la moins coûteuse.

L’objet de la vente au prix de revient n’est donc autre que d’orienter valablement les choix des usagers. Si l’énergie électrique est vendue au prix de revient, le consommateur prendra la décision qu’il aurait prise en se plaçant sur le plan national. Si elle est vendue trop bon marché à certains, et trop cher à d’autres, les premiers seront conduits à la gaspiller en la préférant à d’autres formes d’énergie, ou en négligeant les efforts qui permettraient d’améliorer le rendement de leur utilisation ; tandis que les seconds en feront un usage trop parcimonieux, consacreront des efforts inutiles à l’économiser, ou lui préfèreront des formes d’énergie en réalité plus coûteuses.

 

2. Pourquoi vendre au prix de revient marginal ?

Un gros industriel envisage d’équiper des fours électriques. Suivant qu’il donnera suite ou non à son projet, on devra ou non produire quelques millions de kWh supplémentaires. C’est le coût pour la collectivité de ces kWh supplémentaires qui est en cause, et non le coût moyen de production du kWh dans la région.

La chose est particulièrement nette en France actuellement. Du fait de la dévalorisation de la monnaie, qui a épongé une large part des charges financières des usines hydrauliques, le coût moyen comptable du kWh hydraulique aux bornes des usines est particulièrement faible — disons 2 F/kWh par exemple[1]. Mais le coût du kWh produit par les usines nouvelles, qui supporte la totalité des charges financières du capital investi, est nettement plus élevé, par exemple 3,50 F/kWh.

Si l’énergie électrique est facturée, dans chaque région, au prix moyen comptable, notre industriel n’hésitera pas un instant. Quitte à supporter des frais plus élevés sur d’autres chapitres de dépenses, il viendra s’installer en zone hydraulique pour bénéficier de kWh à 2 F. Moyennant quoi, le producteur devra équiper une nouvelle usine hydraulique dont la production lui coûtera, et coûtera au pays, 3,50 F par kWh…

À ce prix, peut-être notre industriel eût-il renoncé à ses projets ; peut-être aurait-il choisi de s’installer dans une autre région où, pour des prix d’énergie électrique analogues, il eût bénéficié à d’autres égards de conditions de main-d’œuvre ou de transport plus favorables. En facturant l’énergie au prix moyen comptable au lieu de la faire payer au prix de la production des nouvelles usines, on l’a incité à faire de faux choix.

Sans doute cet exemple est-il particulièrement saisissant en raison de la différence importante des prix en cause. Mais le raisonnement reste valable dès lors qu’apparaît le moindre écart entre prix moyen et prix de développement. S’agissant encore d’usines hydrauliques, si l’épuisement progressif des sites utilisables conduit à équiper des usines de plus en plus coûteuses, c’est le coût de l’énergie produite par les usines marginales qu’il faut considérer, et non le prix moyen de la production de l’ensemble des usines en service. Car c’est toujours la prochaine usine qui est en cause.

Mais, objectera-t-on, le raisonnement vaut sans doute pour les nouveaux consommateurs, ou les accroissements de consommation des anciens abonnés ; il justifie qu’on se réfère au coût des nouvelles usines pour les nouvelles consommations, mais n’interdit en rien de vendre au prix moyen comptable les fournitures antérieures.

En fait, toute consommation est toujours nouvelle, car la décision d’y renoncer peut être prise à tout instant. Les prix de l’énergie doivent être tels que le chef d’entreprise soit constamment mis en présence du coût que ferait supporter à la collectivité un accroissement de sa consommation ; mais ils doivent également le renseigner sur l’économie que réaliserait la collectivité s’il diminuait sa consommation actuelle, soit en déplaçant ses usines, soit en modifiant sa fabrication, soit, plus souvent, en améliorant sa technique, et, notamment, le rendement de son utilisation. Or, dans une industrie en expansion, comme la nôtre, la diminution de la consommation d’un abonné permet de satisfaire l’accroissement de consommation d’un autre abonné dont la demande aurait exigé, sans cela, la construction d’une nouvelle usine : c’est encore le coût de la nouvelle usine qui intervient, et non le coût moyen des usines déjà en service.

Du strict point de vue de l’entreprise, on sait, d’autre part, tout l’intérêt que présente la vente au coût marginal.

En consentant à vendre systématiquement une partie de l’énergie produite à un prix inférieur au coût marginal, l’entreprise s’engage sur la voie du déficit si la consommation des bénéficiaires de ces prix privilégiés vient à se développer. Et en vendant à d’autres au-dessus du coût marginal, l’entreprise décourage les consommations qui ne peuvent supporter un prix d’énergie trop élevé, et se prive ainsi de certains débouchés ; d’autre part, elle se rend vulnérable à la concurrence des autres formes d’énergie, ou des centrales autonomes, ce qui n’est pas sans risques.

Mais ces points ont déjà donné lieu à bien des développements.

 

3. De quel coût marginal s’agit-il ?

La notion de coût marginal a été évoquée ci-dessus en opposant le coût du kWh produit par de nouvelles usines au coût moyen de la production de l’ensemble des usines en service. C’est là une vue sommaire des choses qu’il importe de préciser.

En toute rigueur, le coût marginal est le coût de l’unité supplémentaire.

On songe aussitôt aux frais proportionnels à la production — toutes charges fixes exclues — et conclut que cette théorie est absurde, qui veut que les tarifs ne rémunèrent aucune charge fixe… Et comme les théoriciens du marginalisme ne cachent pas que, dans certains cas, la vente au coût marginal peut mettre l’entreprise en perte, on en vient à penser que le déficit est de l’ordre de grandeur du total des charges fixes de l’entreprise ; à cette phase du raisonnement, les gens de bon sens se récusent, tandis que des théoriciens s’ingénient à échafauder des systèmes qui puissent permettre de récupérer au moins une part de cet énorme déficit.

On ne saurait trop insister sur le caractère erroné de cette interprétation simpliste du marginalisme. Si telle était l’essence de la théorie, il serait urgent de n’en plus parler.

Qu’il suffise de rappeler qu’on démontre, dans le même corps de théorie, qu’en concurrence parfaite, la vente au coût marginal assure la maximation du bénéfice et l’équilibre budgétaire de l’entreprise marginale. Comment cela serait-il possible si le coût marginal s’identifiait au coût proportionnel ?

Malheureusement, un certain niveau d’abstraction est nécessaire pour débrouiller l’écheveau des idées qui permet de faire le lien entre le coût marginal, coût de l’unité supplémentaire, et le coût marginal entendu — très sommairement — au sens du coût moyen de la production de l’usine supplémentaire. À défaut de pouvoir ici s’engager dans la voie des démonstrations, prenons quelques exemples.

Considérons une ligne de transport d’énergie électrique dont on admettra :

1)  qu’elle transite une puissance constante toute l’année (ceci afin de pouvoir raisonner, sans équivoque, en kW),

2)  que les dépenses nécessaires pour compenser les chutes de tension sont négligeables devant le coût des pertes.

Si la ligne est peu chargée, les pertes additionnelles qu’entraînerait le transport d’un kW supplémentaire (pendant toute l’année) sont faibles : le coût marginal du transport, égal aux pertes marginales, est alors très petit. Lorsque la charge envisagée croît, les pertes moyennes croissent, et a fortiori les pertes marginales. Pour des charges très élevées, les pertes moyennes sont importantes, et les pertes marginales  considérables : le coût marginal du transport est alors très élevé.

Vendre le transport au coût marginal, c’est facturer tous les kW transportés à un prix égal au coût des pertes qu’entraîne le transport du kW marginal. Si la ligne est largement surdimensionnée, sa charge est faible, les pertes marginales sont peu élevées, et la vente du transport au coût marginal, tout en rentant plus que les pertes (puisque les pertes moyennes sont inférieures aux pertes marginales) ne suffit pas à renter les charges fixes de la ligne. Si, au contraire, la ligne est très sous-équipée, les pertes marginales sont considérables, le coût marginal du transport est très élevé, et la vente du transport au coût marginal assure des recettes largement supérieures au total du coût des pertes et des charges fixes.

Il apparaît ainsi — et c’est un résultat absolument général — que la vente au coût marginal est déficitaire lorsque l’entreprise est suréquipée par rapport à la demande, mais qu’elle est bénéficiaire lorsque l’entreprise est très sous-équipée.

Le résultat eût été tout différent si, faisant nous-mêmes la confusion que l’on fait trop souvent, nous avions admis que le coût marginal du transport était égal au coût des pertes moyennes par kWh, de sorte que la vente au coût marginal n’aurait jamais renté que les pertes, à l’exclusion de toute charge fixe.

Ce premier point étant établi, on notera que l’entreprise ne consentira pas éternellement à rester sous-équipée. Pour éluder le problème des discontinuités, admettons que l’entreprise dispose d’un grand nombre de lignes identiques, assurant le même transport et chargées de la même manière. Si ces lignes sont trop chargées, on en construira une autre : les charges fixes de l’ensemble du système augmenteront de celles de la ligne supplémentaire, mais le coût total des pertes diminuera du fait que la charge de chaque ligne sera plus faible. Si le gain annuel réalisé en diminuant les pertes est supérieur à la dépense annuelle résultant de l’accroissement des charges fixes, les lignes étaient effectivement trop chargées et on a eu raison d’en construire une autre ; on devra même en construire une deuxième si le bilan annuel de. L’opération reste bénéficiaire, et une autre encore… jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien à gagner.

Lorsque ce niveau d’équipement optimum sera réalisé, le coût marginal du transport sur l’une quelconque des lignés du réseau sera précisément égal au coût moyen du transport sur la dernière ligne réalisée ; car ceci n’est qu’une autre manière de présenter l’égalité entre les charges fixes de la dernière ligne réalisée et la diminution des pertes résultant de sa réalisation.

C’est là un deuxième résultat de portée absolument générale : lorsque l’équipement est optimum, la vente au coût marginal des services assurés par l’équipement marginal rente exactement les dépenses de cet équipement marginal ; de sorte que la vente au coût marginal est équivalente à la vente au coût moyen de l’équipement marginal : on retrouve la notion de coût de l’usine supplémentaire précédemment évoquée.

On notera d’ailleurs — mais ceci n’est plus un résultat absolument général, encore qu’il soit à peu près vérifié dans bien des cas — que toutes les lignes ayant été supposées identiques, l’équilibre budgétaire reconnu pour la dernière ligne implique l’équilibre budgétaire pour toutes les lignes, et, par conséquent, l’équilibre budgétaire pour l’ensemble de l’exploitation. D’où résulte, inversement, que c’est dans la mesure où le coût moyen de production de l’équipement marginal diffère du coût moyen de production des équipements non marginaux que la vente au coût marginal peut couvrir plus ou moins que le total des dépenses de l’entreprise.

Il nous faut maintenant établir un troisième point.

Revenons au cas, plus réel, où

1) le transport est effectué par une seule ligne ou un petit nombre de ligne,

2) la charge à transporter croît d’année en année au fur et à mesure du développement de la demande. Nous continuerons cependant à admettre que,

3) la charge à transporter est constante pendant l’année (et le coût des chutes de tension est négligeable).

L’entreprise ne peut adapter chaque année ses équipements à l’accroissement de la demande. Si cet accroissement est tel qu’il correspond en huit ans à la capacité d’une ligne, et si l’équipement est aujourd’hui optimum, c’est dans quatre ans environ qu’il faudra construire une nouvelle ligne. Pendant les quatre années qui viennent l’entreprise sera sous-équipée, et le coût marginal de transport sera de plus en plus élevé, puis pendant les quatre ans suivants l’entreprise sera suréquipée et le coût marginal, devenu brusquement très faible, croîtra progressivement jusqu’à atteindre dans huit ans son niveau normal correspondant à un équipement optimum.

Si les tarifs de transport doivent être stables, et l’on ne conçoit pas que des tarifs puissent ne pas l’être, il ne saurait être question de suivre la variation de la valeur réelle du coût marginal d’année en année on devra adopter une valeur moyenne, laquelle correspond précisément à la valeur qu’aurait le coût marginal si les équipements pouvaient rester constamment adaptés.

D’où un troisième résultat, de portée générale également (dans une industrie en expansion) : les tarifs de vente au coût marginal doivent être établis en se référant à des installations qui resteraient constamment adaptées, quelles que puissent être, en fait, les phases successives de suréquipement ou de sous-équipement que traverse l’entreprise.

Ceci n’exclut pas, bien entendu, que l’on puisse pratiquer des prix égaux au coût marginal effectif de l’année en cours, pour des transports occasionnels ; mais il ne s’agit plus alors de tarifs sur la stabilité desquels la clientèle puisse compter.

Ce troisième point nous autorise à raisonner dans le cas d’un équipement optimum pour établir un quatrième et dernier point.

Abandonnons l’hypothèse d’une charge constante toute l’année : la ligne transporte une courbe de charge.

Aux époques où la charge est faible, le coût marginal l’est aussi et le tarif doit être bon marché. Lorsque la charge est élevée, le tarif doit être cher. Si, à quelques variations aléatoires près, la courbe de charge transportée par la ligne a une forme à peu près connue — ce serait le cas d’une ligne desservant la consommation d’une ville — il est possible d’associer à chaque période de l’année et de la journée un coût marginal différent que l’on pourra traduire dans un tarif de vente différencié entre l’été et l’hiver, entre le jour et la nuit, etc.

Et comme la ligne est supposée optimum, l’utilisation de ce tarif assurera encore l’équilibre budgétaire de l’entreprise de transport en vertu du raisonnement qu’on a fait pour établir le deuxième point.

D’où un quatrième résultat de portée générale : l’examen des courbes de charge permet, lorsque ces courbes ont une certaine stabilité, d’établir un tarif au coût marginal différencié suivant les heures et les saisons qui représente le coût de l’unité supplémentaire aux différentes époques de l’année.

Ce qui vient d’être dit à propos des lignes de transport peut être retrouvé en étudiant l’un quelconque de nos outils de production. L’étude des installations inélastiques — c’est-à-dire celles dont la capacité est déterminée de façon rigide, à la différence d’une ligne de transport que l’on peut toujours charger plus que sa charge normale — présente des difficultés particulières qu’il ne nous est pas possible d’aborder ici[2].

Mais notre objet était surtout de montrer, sur un exemple familier aux électriciens, les principaux aspects de la tarification au coût marginal.

 

4. Conclusion

Sans doute bien des objections sont-elles nées dans l’esprit du lecteur, à l’examen de cette trop brève esquisse de la théorie marginaliste. Nous voudrions tout au moins avoir dégagé quelques points autour desquels puissent s’engager sans équivoque des discussions fructueuses.

Quant aux principes, la théorie nous paraît reposer sur quelques idées que le bon sens ne saurait répudier : vendre au prix de revient, et, plus précisément, au prix de revient marginal, de telle manière que les choix effectués par les usagers entre les diverses formes d’énergie et les divers modes d’utilisation soient orientés en fonction du coût de la fourniture pour la collectivité.

Dans l’application, la théorie exige quelques précautions : ne pas confondre coût marginal et coût proportionnel ; raisonner sur des équipements adaptés ; interpréter avec prudence le cas des installations inélastiques.

Moyennant quoi, la vente au coût marginal n’a rien de paradoxal, ni de monstrueux. Elle conduit d’ailleurs à une tarification qui s’apparente dans une large mesure aux tarifs traditionnels. De sorte qu’il s’agit beaucoup plus d’une prise de conscience que d’un bouleversement des idées.

Comme toute prise de conscience, celle-ci donne plus de rigueur à la pensée, assoit mieux des principes que l’intuition sentait confusément, suggère des améliorations. À cet égard, l’apport du marginalisme est de première importance. Mais son intervention dans la tarification de l’énergie électrique n’a rien de révolutionnaire.

 


Notes et références

[1] Ces francs sont ceux de 1956 (anciens francs)

[2] Voir Revue Générale de l’Electricité, août 1949, p. 321 « La tarification des demandes en pointe : application de la théorie de la vente au coût marginal ».

 


Cette notice est la reprise exacte de l’article publié pour la première fois dans le Bulletin de l’Association Suisse des Electriciens, pages de l’U.C.S., XLVII, 24 (1956), puis dans la Revue Française de l’Energie, VIII, 81 (1956) et finalement dans l’ouvrage de Morlat G. et Bessière F., études présentées par. (1971). Vingt cinq ans d’économie électrique. Investissements, coûts marginaux et tarifs.  Paris : Dunod, 452 p, pp. 265-275. Marcel Boiteux est vivement remercié d’avoir autorisé la publication de cet article dans l’Encyclopédie de l’Energie.


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