Gaz Électricité de Grenoble (GEG), un acteur local porteur d’innovation énergétique

Au cours de la deuxième moitié du 20ème siècle, en France, la distribution du gaz et de l’électricité a été l’affaire de grandes entreprises publiques, jouissant d’un quasi-monopole. Dans ce contexte, le rôle joué par les petites entreprises locales ayant échappé à la loi de nationalisation a été oublié. Tel n’est plus le cas depuis la libéralisation des industries de l’énergie.


Le 1er octobre 1903 est une date qui compte dans l’histoire énergétique de la ville de Grenoble. Pour la première fois, le gaz et l’électricité sont réunis au sein d’un même service municipal, celui de l’Éclairage et de la Distribution d’Énergie Gaz et Électricité qui deviendra Gaz Électricité de Grenoble (GEG), en 1986. Cet évènement marque d’ailleurs le début des grands travaux de pose de câbles électriques à Grenoble constituant, ainsi, le premier maillage historique du réseau électrique de la ville.

En ce 1er octobre 1903, l’électricité devient donc une affaire municipale, au même titre que la production et la distribution du gaz, gérées par la ville de Grenoble depuis le 1er janvier 1867 au sein du service municipal d’exploitation et de distribution du gaz.

Deux énergies à exploiter, à produire (pour le gaz de ville) et à distribuer, quelques 60 000 Grenoblois à satisfaire en ce début du 20ème siècle, l’aventure de Gaz Électricité de Grenoble, héritière du service municipal, ne fait alors que commencer.

 

1. L’innovation énergétique, fil directeur d’un siècle à l’autre

Fig. 1 : Grenoble et son téléphérique – Source : Nick Birch via Wikimedia Commons

Gaz Électricité de Grenoble est une entreprise fortement et durablement ancrée sur le territoire grenoblois (Figure 1). Son histoire évolue en interaction avec celle de la ville de Grenoble, au gré des innovations scientifiques et techniques, qu’elles soient gazières ou électriques. Son histoire démontre aussi une capacité à innover et à se renouveler au fil des décennies, dans des contextes énergétiques différents mais où la soif d’innover reste la même : fin du 19ème – début du 20ème, avec la découverte d’une nouvelle énergie, l’électricité ; et fin du 20ème – début du 21ème, avec la découverte d’autres d’autres procédés pour produire du gaz et de l’électricité, tout en développant de nouvelles façons de les consommer.

Point commun de ces deux périodes, la soif d’innover avec des objectifs, certes, différents : aller plus loin dans la puissance énergétique pour l’une (deuxième révolution industrielle oblige) ; économiser l’énergie et la maîtriser afin de protéger la planète pour l’autre (développement durable s’entend). De fait, parler d’innovation énergétique était et est encore aujourd’hui une question d’actualité, et un axe stratégique prioritaire pour GEG.

On relève aussi d’autres points communs. Si l’on regarde d’un peu plus près ces deux périodes, on constate que les acteurs et témoins de ces innovations énergétiques restent les mêmes. En effet, les collectivités locales (Ville de Grenoble), les industriels et les Grenoblois ont partagé et partagent encore aujourd’hui la même volonté d’expérimenter et de tester de nouvelles techniques ou de nouvelles logiques énergétiques. En termes de creuset d’innovation, on se rend compte également que la ville de Grenoble, et plus largement la région Auvergne-Rhône-Alpes (ARA), ont aussi été et sont encore aujourd’hui, à elles seules, un terrain d’expérimentation qui n’a jamais démérité. Pour autant, on constate aussi une certaine difficulté à innover, illustrée par une résistance au changement de la part de la population par exemple. Car cela perturbe les habitudes de la vie quotidienne, bouscule l’ordre établi et les idées reçues, pour finalement arriver à une phase d’acceptabilité de la population et des clients d’hier et d’aujourd’hui. De fait, c’est dans ces contextes séparés d’une centaine d’années l’un de l’autre où l’innovation tient une place essentielle, que GEG a apporté et apporte actuellement, dans une continuité temporelle, sa pierre à l’édifice.

 

2. De la découverte à la diversification

Dans les années 1880, l’arrivée de l’électricité dans la région Rhône-alpine bouleversa considérablement le mode de vie des Grenoblois et permit aux industries locales de faire un bond en avant, à la fois technique et énergétique. Force, lumière puis, quelques années plus tard, chaleur, c’est ce que promettait cette nouvelle énergie, pour laquelle se passionnait la communauté scientifique et industrielle de l’époque. Et au bénéfice de laquelle, aussi, les municipalités d’Édouard Rey et de Stéphane Jay firent des choix stratégiques qui engagèrent la ville sur le long terme.

2.1. Une nouvelle énergie : l’électricité

Fig. 2 : Portrait de Aristide Bergès – Source: Archive municipal de Grenoble via Wikimedia Commons

En cette fin du 19ème siècle, Marcel Deprez, Louis Bravet, Aristide Bergès et consorts prirent la ville de Grenoble et sa région pour un vaste terrain d’expérimentation (Figure 2). Citons, à titre d’exemples, les expériences de transport de force électrique entre Vizille et la Halle aux Grains de Grenoble que mena Marcel Deprez, en 1883. Ou bien encore cette expérience d’un jour organisée le 14 juillet 1882 [1] par Édouard Rey (Maire de Grenoble de 1881 à 1888) avec l’aide d’Aristide Bergès, quand les grenoblois dansèrent, émerveillés, à la lueur d’une vingtaine d’ampoules électriques installées place de la Constitution (actuelle place de Verdun). Parallèlement, les travaux d’Aristide Bergès [2], Amable Matussière et Alfred Fredet portant sur l’exploitation des hautes chutes du balcon de Belledonne, débouchèrent sur le développement sans précédent de l’hydroélectricité (Lire : Les ouvrages hydrauliques).

Partie prenante, la municipalité d’Édouard Rey, désireuse d’expérimenter, elle aussi, l’éclairage électrique à l’échelle d’une ville, encouragea l’initiative de Louis Bravet et lui concéda, de 1888 à 1897, l’exploitation de l’éclairage électrique de la ville et de ses habitants [3]. Ces 10 années de concession furent, pour la ville, une période de transition pendant laquelle elle prit le temps d’étudier les paramètres et les conséquences de l’utilisation de cette nouvelle énergie, tant dans l’éclairage public et privé que dans l’utilisation de sa force motrice. Elle attendait également de voir si, financièrement parlant, il était intéressant d’investir durablement dans cette nouvelle énergie. Mais comment permettre à l’électricité de développer son réseau, sans pour autant léser l’usine à gaz de la ville ? En l’exploitant elle-même, comme le décidera la municipalité de Stéphane Jay qui, en 1903, réunira ces deux énergies dans un seul et même service municipal (dont GEG est l’héritière) réglant ainsi, et pour longtemps, l’avenir énergétique de la ville (Lire : Histoire de l’électricité et Hydroélectricité : les conduites forcées de l’entreprise Bouchayer-Viallet à Grenoble).

2.2. De nouveaux moyens de production à l’aube du 21ème siècle

Fig. 3 : Le barrage de Monteynard, Isère – Source: David Monniaux via Wikimedia Commons

Si la fin du 19ème siècle symbolise la découverte d’une nouvelle énergie, la fin du siècle dernier et le début de l’actuel s’illustrèrent plutôt par la mise en œuvre de solutions innovantes permettant de produire de l’électricité de multiples façons, en faisant une part belle aux énergies renouvelables.

De part son histoire et sa présence sur le territoire Rhône-alpin, GEG s’attache donc depuis plus de 20 ans à produire propre. La maîtrise de l’énergie et le développement des énergies renouvelables sont, ainsi, au cœur de sa stratégie d’entreprise depuis le milieu des années 1990. L’acquisition et l’exploitation d’une douzaine de centrales hydroélectriques hautes et basses chutes en Isère, en Savoie et dans le Doubs, les réalisations photovoltaïques à Grenoble comme sur le site Bouchayer-Viallet ou la Zac de Bonne, l’exploitation de cogénérations en plein cœur de la ville et d’éoliennes à Rivesaltes (Pyrénées Orientales), sont autant de preuves concrètes de la volonté de GEG d’accroître sa production d’énergie verte et de chaleur propre (Figure 3). Ce sont, aussi, autant de réalisations qui font de cet énergéticien un producteur d’électricité de référence et de proximité de la région grenobloise, bien ancré dans son maillage local, au même titre qu’il le fut dans le courant du 20ème siècle en tant que producteur historique de gaz de ville à Grenoble (Lire : La petite hydroélectricité en France).

 

3. Consommer l’énergie autrement

Faire le parallèle entre la Belle Époque et le début du 21ème siècle, c’est aussi dresser un tableau de la consommation énergétique et conjuguer le verbe innover de deux façons : en développant les usages de l’électricité et du gaz à la fin du 19ème – début 20ème, et en apprenant à l’économiser à la fin du 20ème – début 21ème.

Depuis plus de 100 ans, GEG a été le témoin actif de ces changements de mode de consommation énergétique, accompagnant à la fois la population et ses clients sur la voie de la modernité, tout en appuyant les parties prenantes dans leurs choix stratégiques.

3.1. 1890-1925 : Une nouvelle énergie pour de nouveaux modes de consommation

Fig. 4 : Ancienne lampe à gaz – Source : Giani Pralea, Pixabay

Pendant les années 1890, l’énergie gazière et le courant électrique se concurrencèrent vivement sur le marché grenoblois, attisant l’esprit inventif et innovant du service municipal d’exploitation et de distribution du gaz. Il faut dire que la Société Grenobloise d’Éclairage Électrique (la SGEE, dirigée par Louis Bravet) lui avait, en quelque sorte, piqué ses plus gros clients (hôtels, cafés, magasins, ateliers) qui préféraient s’éclairer à l’électricité, délaissant ainsi le gaz de ville. Pour parer à cette situation concurrentielle, le service municipal d’exploitation et de distribution du gaz décida de jouer la carte de l’innovation technique en proposant aux Grenoblois des becs de gaz dits « Auer ». Plus économiques et plus puissants (leur pouvoir éclairant étant évalué à quatre carcels au lieu d’un pour les becs de gaz dits « papillons »), ces becs à incandescence se firent une place dans les foyers grenoblois et les rues de Grenoble (aux côtés des lampes à arc nouvellement installées) (Figure 4). Autre conséquence de cette concurrence : la vulgarisation des usages domestiques du gaz autre que l’éclairage comme dans la cuisine par exemple. Un magasin d’exposition d’appareils à gaz dernier cri fut même installé par le service municipal du gaz, rue Hector-Berlioz, afin de vanter les avantages du tout au gaz. Il n’était cependant pas question de nuire à l’engouement de la population grenobloise pour l’électricité car au tournant du 20ème siècle, la municipalité de l’époque avait d’ores et déjà bien compris que l’électricité serait l’énergie de demain.

C’est pourquoi, dès la création du service municipal de l’éclairage et de la distribution d’énergie gaz et électricité en 1903, la ville de Grenoble décida d’accélérer l’électrification de la cité avec la réalisation du 1er réseau électrique de la ville [4] que l’on doit, tout comme la municipalisation de l’électricité, à l’équipe de Stéphane Jay (maire de Grenoble de 1896 à 1904). Des tranchées furent creusées un peu partout en ville pour enfouir les câbles électriques. Des transformateurs, ressemblant étrangement à des kiosques à journaux, s’élevèrent sur les trottoirs. On constatait alors une certaine résistance au changement de la part de la population, car les travaux n’étaient pas du goût de tout le monde. Les plaintes des habitants déposées sur le bureau du maire et relayées par la presse de l’époque étaient fréquentes, tant du point de vue de la lenteur des travaux que de l’emplacement des transformateurs quelquefois installés, bien malencontreusement, devant les vitrines de magasins ou de commerces [5]. Les parties prenantes locales se devaient donc de faire accepter cette nouvelle énergie dans le paysage-même de la ville, car la construction du réseau électrique était, avant tout, une entreprise d’utilité publique, pour le bien des administrés.

Elles se devaient, aussi, de faire évoluer les mentalités afin de faire accepter cette énergie innovante jusqu’au cœur des foyers et dans chaque geste de la vie quotidienne. Différentes manifestations permirent ainsi, dans un esprit pédagogique, de vulgariser les usages électriques. Le Palais de l’Électricité et sa fontaine lumineuse permirent par exemple, lors de l’Exposition universelle de 1900, de dévoiler au grand public certaines applications et usages de l’électricité. Quelques années plus tard, l’Exposition internationale de la Houille blanche et du Tourisme, qui se tint à Grenoble du 21 mai au 12 octobre 1925, traduisit la volonté de Paul Mistral et de son équipe de faire découvrir la houille blanche, ses avancées, ses métiers et ses applications nouvelles, déclinées jusque dans les usages de la vie quotidienne. Pour démontrer la toute puissance de l’éclairage électrique au visiteur, l’entrée de l’exposition était aussi éclairée, à la tombée de la nuit, de centaines d’ampoules électriques et la tour Perret s’illuminait alors, grâce à une ampoule de 10 000 Watts (Figure 5).

Fig. 5 : Exposition Internationale de la Houille Blanche, 1925 – Source : Wikimedia Commons

Ces différents événements participèrent à l’évolution des mentalités. D’autres opérations sur le terrain permirent, aussi, d’accélérer l’électrification de la cité grenobloise. À commencer par l’éclairage public et le remplacement progressif des becs de gaz par des lampes à arc du système Blondel-Auer ou des lampes à filament métallique. Pour donner l’exemple, la ville de Grenoble remplaça l’éclairage au gaz des établissements municipaux par l’éclairage électrique. Les becs de gaz communs des immeubles disparurent eux aussi, petit à petit, au profit de l’électricité. Et en 1914, soit 10 ans après l’inauguration du 1er réseau électrique grenoblois par Charles Rivail (successeur de Stéphane Jay à la mairie de Grenoble), toutes les voies publiques étaient éclairées à l’électricité. Leur allumage et leur extinction étaient gérés par des allumeurs-extincteurs automatiques, installés dans les transformateurs. Cette innovation technique fit d’ailleurs disparaître le métier d’allumeur de réverbères, un des cœurs de métier du service municipal de l’éclairage depuis 1867.

Parallèlement, le changement des mentalités quant à l’utilisation de l’électricité se traduisit par une évolution notable de la vie domestique [6]. L’électricité devint très vite indispensable dans les gestes de la vie quotidienne entraînant, de fait, le renforcement des réseaux basse tension. Cette banalisation de l’usage du courant électrique fut accompagnée, dans les années 1920, par la création d’un tarif spécial établi par le service municipal de l’éclairage et de la distribution d’énergie gaz et électricité. Ce tarif favorisa ainsi l’utilisation des petits appareils électriques comme les fers à repasser, les bouilloires, ou bien encore les moteurs de machines à coudre. Dans le même temps et pour ne pas léser l’utilisation du gaz de ville, le service municipal décida d’axer son utilisation dans la cuisine et le chauffage. Il donna même l’exemple en installant le chauffage central au gaz dans ses bureaux administratifs rue Hector-Berlioz, afin d’en louer les avantages au grand public. Montrer l’exemple, c’était aussi démontrer à ses abonnés, comme on appelait alors les clients, que le service municipal de l’éclairage et de la distribution d’énergie gaz et électricité mettait l’innovation au cœur de sa politique de développement.

Ainsi, l’évolution des techniques, la modernisation des appareils et l’acceptation par la population de nouveaux modes de consommation incités par les pouvoirs publics, firent entrer l’innovation énergétique en général, et la fée électricité en particulier, dans tous les foyers grenoblois.

3.2. 1990-2018 : Consommer moins, consommer mieux

Depuis déjà quelques années, le développement durable impose de moins et mieux consommer. Dans un souci de mieux gérer notre consommation énergétique, la maîtrise de l’énergie est au centre de nouveaux usages, de nouvelles techniques de production et de gestion des énergies. Elle est aussi au cœur des axes stratégiques développés depuis quelques années par Gaz Électricité de Grenoble qui, désireuse de rester à la pointe du progrès et au plus près des besoins actuels, souhaite offrir à ses clients des solutions où l’innovation tient une place essentielle.

De fait, le contexte énergétique des années 2010 n’est plus du tout le même par rapport à celui de la fin du 19ème siècle, lorsque les Grenoblois se faisaient régulièrement photographiés devant les candélabres d’éclairage public ornés de lampes à arc électrique, symboles de modernité de la Belle Époque.

En 2018, le consommateur est beaucoup plus exigeant dans sa relation à l’énergie, à laquelle il demande d’être plus efficace et vertueuse écologiquement. Cette nouvelle demande impose donc aux énergéticiens actuels, tels Gaz Électricité de Grenoble, de mettre en place de nouvelles technologies et de nouvelles offres allant vers une meilleure maîtrise de l’énergie. Cette relation à l’énergie impose aussi aux moyens de production, à base d’énergies nouvelles et renouvelables, d’être de plus en plus innovants et de plus en plus flexibles pour une meilleure gestion de l’utilisation de l’énergie, moins carbonée et plus à l’écoute de la consommation du client final. D’autre part, les nouveaux usages comme la mobilité électrique ou bien encore les nouvelles façons d’habiter nos logements, sont autant d’exemples démontrant la capacité des acteurs énergétiques à se renouveler en prenant en compte les modes de consommation actuels de la population et leur volonté de diminuer leur empreinte énergétique dans leur environnement immédiat. Cette nouvelle donne impose donc aux gestionnaires de réseau dont Gaz Électricité de Grenoble fait partie, une adaptation certaine à ces évolutions pour garantir la sécurité et la continuité d’approvisionnement, certes, mais aussi une bonne gestion des équilibres entre l’offre et la demande (Lire : La transition énergétique, enjeu majeur pour la planète).

Fig. 6 : La Presqu'ile scientifique à Grenoble – Source : Milky [GFDL (http://www.gnu.org/copyleft/fdl.html) or CC BY-SA 3.0 (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0)], via Wikimedia Commons

L’innovation énergétique, à la fin des années 2010, n’est, de fait, plus seulement une envie, comme à la fin du 19ème siècle. Elle devient surtout une nécessité, dans un contexte où l’ouverture des marchés et la concurrence incitent aussi fortement les acteurs de l’énergie à rester dans la course. L’innovation se met donc au service de l’énergie intelligente au travers de multiples projets innovants. Le progrès technologique en matière d’électronique, de communication, d’informatique et de télécommunication permet ainsi d’avoir, dans le domaine de l’énergie, une approche multi-technique et donc partenariale type pôle de compétitivité. Le projet de la future presqu’île en est un exemple concret, dans lequel GEG, de par son expertise énergétique, tient une place importante (Figure 6). Par conséquent, les énergéticiens actuels se doivent de s’associer avec d’autres partenaires industriels, multipliant ainsi les intervenants.

Pour autant et comme à la fin du 19ème siècle, les parties prenantes telles que les collectivités publiques, restent fortement mobilisées et extrêmement intéressées par ces projets. Elles souhaitent avant tout construire la ville de demain et les projets urbanistiques envisagés s’ancrent, indubitablement, dans une volonté plus large d’expérimenter les choix énergétiques du futur. La mise en place du schéma énergétique « facteur 4 » jusqu’en 2050 est un exemple de collaboration grenobloise entre collectivités, entreprises et industriels qui expérimentent, ensemble, différents projets sur le territoire de Grenoble. Cette association ne date d’ailleurs pas d’hier puisqu’un siècle auparavant, les acteurs étaient déjà les mêmes.

Fig 7 : Écoquartier de Bonne, Grenoble – Source: Bertrand Marion via Wikimedia Commons

Les différentes solutions innovantes sont donc réfléchies et réalisées en cohérence avec la politique locale. Dans ce cadre et en partenariat sur les grands projets de développement urbain, GEG a participé activement au projet expérimental de la ZAC de Bonne, premier écoquartier labellisé de France [7]. Objectif : expérimenter grandeur nature et en plein cœur de la ville une façon de vivre certes différente, mais avec comme finalité une qualité de vie optimale, tout en diminuant les consommations énergétiques de chacun (Figure 7). Fortement impliquée et souhaitant démontrer son savoir-faire, GEG a ainsi proposé à la ville de Grenoble des solutions innovantes en matière d’énergie renouvelable et durable avec la réalisation d’une centrale photovoltaïque installée en verrière et sur la toiture du centre commercial. Ce qui en fait, d’ailleurs, une réalisation pédagogique d’importance puisqu’elle est facilement visible du grand public. GEG a aussi déployé, dans ce nouveau quartier, neuf petites cogénérations nichées au cœur des bâtiments d’habitation. Couplées à des chaudières gaz à condensation, ces cogénérations fonctionnent au gaz naturel, énergie primaire choisie pour sa combustion propre, sa flexibilité et son non-stockage sur site. Produisant à la fois de la chaleur et de l’électricité au plus proche des habitants, elles évitent, de fait, les pertes en ligne puisque la chaleur et l’électricité produites sont directement consommées sur place. GEG a ainsi été la première en France à proposer ce moyen de production énergétique performant dans du logement collectif (bailleurs sociaux et copropriétés) à l’échelle d’un quartier.

Les expériences innovantes conduites aujourd’hui sur le territoire grenoblois sont donc multiples. Dans le cadre des Smart Grid également, GEG prépare ainsi l’avenir en investissant dans l’énergie du futur. Car en tant que producteur, distributeur et fournisseur, GEG doit s’adapter à l’évolution du contexte énergétique impliquant un nouvel équilibre de l’offre et de la demande. Ainsi, depuis quelques temps déjà, de nombreux éléments agissent sur le réseau existant, à savoir : l’impact grandissant de la production décentralisée (photovoltaïque, éolien, hydroélectricité et cogénération) ; la prise de conscience environnementale du consommateur ; la nécessité, aussi, de piloter au plus près la demande d’énergie pour limiter la consommation de pointe et maîtriser le coût pour les consommateurs ; et, enfin, le développement de nouveaux usages du réseau comme les voitures électriques, à fort impact potentiel sur son équilibre et son pilotage. Les compteurs communicants et les réseaux électriques intelligents que l’on désigne sous le vocable très général de Smart Grid sont donc autant de réponses innovantes à cette nouvelle donne, pour lesquelles Gaz Électricité de Grenoble entend bien être force de proposition en matière d’innovation énergétique, de par son expérience du terrain et l’expertise de ses métiers plus que centenaires (Lire : Compteur communicant).

Fig. 8 : Logo GreenLys – Source : Youtube

Répondant ainsi à un appel à manifestation d’intérêt (AMI), lancé par l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME) en 2009, GEG s’est associée avec un consortium d’entreprises et de collectivités locales (ERDF, GDF Suez, Schneider, Grenoble INP, Atos Origin, Alstom, le CEA, le LEPII, Hespul, les villes de Lyon et de Grenoble) pour développer un projet de mise en place de démonstrateurs Smartgrids (zones d’expérimentation) sur les villes de Lyon et Grenoble. Baptisé GreenLys [8], ce projet implante actuellement sur le réseau de distribution existant de nouveaux outils qui, reliés à un réseau informatique et à un puissant système d’analyse, permettra un meilleur ajustement de la production et de la consommation électrique (Figure 8). Concernant plus particulièrement Grenoble, le démonstrateur grenoblois s’étend actuellement sur la ZAC de Bonne et la presqu’île. Grenoble compte donc près de 200 clients volontaires testant ce type de solution. Leurs motivations en la matière sont d’ailleurs plurielles : certains y voient une façon de participer concrètement à la mise en place des technologies de demain ; d’autres, désireux de réduire significativement leur empreinte énergétique, sont intéressés par cette solution qui leur permet de maîtriser au mieux leur consommation d’énergie en la contrôlant de façon plus fine.

Pédagogiquement parlant, ce projet permet aussi d’intégrer pleinement les Grenoblois dans l’expérimentation et la recherche de solutions énergétiquement innovantes pour demain. Car toute solution innovante se doit d’avoir l’acceptation des populations impactées si elle souhaite durer dans le temps. Dans le cadre de GreenLys, GEG met donc à disposition de ce projet son expertise sur le marché grenoblois, comme la relation de confiance établie avec les clients testeurs et la connaissance parfaite des sites d’expérimentation choisis. En tant que distributeur assurant la sécurité et la continuité de l’approvisionnement électrique à Grenoble, c’est également l’occasion de démontrer son expertise en la matière et de tester les fonctions d’auto-cicatrisation des réseaux. C’est aussi, enfin, une façon de renforcer sa position sur le marché énergétique actuel, tout en consolidant ses relations avec des partenaires stratégiques comme la ville de Grenoble et GDF Suez, actionnaires actuels de l’entreprise.

Parallèlement, ce projet Smartgrids trouve toute sa place dans la démarche EcoCité, préfigurant la ville durable de demain. Le développement de GreenLys, centré sur un réseau électrique intelligent au service du consomm’acteur, pourrait alors s’étendre à une gestion plus large englobant, en plus de l’électricité, d’autres flux énergétiques et fluides tels que le gaz, la chaleur et l’eau. C’est dans cette perspective et dans le cadre de ce projet que GEG et Atos Worldgrid co-pilotent ensemble l’action Smartgrids. L’objectif de cette coopération consiste, comme il est stipulé sur le site geg.fr [9] « à développer une plateforme multi-énergies (gaz, chaleur) et fluides (eau) capable de centraliser, traiter, croiser et restituer les données de consommations à nos clients (particuliers, professionnels, élus et techniciens de la ville), avec la coopération inédite des acteurs énergétiques locaux (GEG, CCIAG, Régie des Eaux…) et la mutualisation de leurs outils et de leurs données. Grâce à une interface accessible depuis un afficheur, un ordinateur personnel ou un Smartphone, il sera possible, par exemple, de connaître sa consommation d’électricité, de gaz, d’eau personnelle mais aussi celle de son immeuble, de son quartier ; ou encore de savoir si le véhicule électrique stationné en bas de sa résidence est disponible… À la clef, de nouvelles offres et de nouveaux services pour mieux gérer et mieux maîtriser ses consommations à l’échelle individuelle et collective » [10].

Porteuse d’innovation, GEG teste donc, aujourd’hui comme hier, les solutions de demain. Comme elle le fait également actuellement dans un autre de ses métiers historiques qu’elle avait abandonné il y a une cinquantaine d’années : la production de gaz. Mais pas n’importe lequel ! GEG souhaite aujourd’hui, à travers sa filiale de production GEG ENeR, expérimenter la filière de biogaz ou gaz vert. Plusieurs études sont d’ailleurs en cours sur le sujet, du développement d’unités de méthanisation aux projets d’injection en Isère. En 2014, produire du gaz est donc, finalement, une sorte de retour aux sources pour GEG qui, dès 1867, produisait déjà du gaz d’éclairage illuminant les rues et les habitations de Grenoble.

En 2013, Gaz Électricité de Grenoble a fêté ses 110 ans d’existence. 110 ans au cours desquels elle aura été successivement service municipal de l’éclairage et de la distribution d’énergie gaz et électricité, Régie Gaz Électricité (RGE) puis société d’économie mixte locale (GEG). Autant d’années passées, aussi, à œuvrer pour un service public de qualité à travers ses cœurs de métiers : distribution, fourniture, éclairage public et production de gaz et d’électricité. Autant de temps consacrés également à faire évoluer l’entreprise sur des axes stratégiques innovants qui lui ont permis, et lui permettent aujourd’hui encore, d’être un acteur local de référence sur lequel la ville de Grenoble a toujours pu compter pour l’accompagner dans ses choix énergétiques, malgré les aléas de l’histoire et ce, depuis le milieu du 19ème siècle.

 


Notes et références

[1] Muller Claude (2009). Edouard Rey, le gantier qui métamorphosa Grenoble. Grenoble : Editions CIRIG. pp. 27-33

[2] Ducluzaux André (1999). Aristide Bergès du mythe à la réalité. Grenoble : Éditions de Belledonne, 153 p.

[3] GEG (2004). L’Aventure de Gaz Electricité de Grenoble – Cent ans d’énergie 1903-2003. Grenoble : Glénat. pp.15-17

[4] Delestre Isabelle, Paillet Charles, Ostapenko Valéria, Monin Jeanne (2011). Stéphane Jay Gantier, Maire de Grenoble, Châtelain d’Uriage. Grenoble : Editions CIRIG. pp. 58-64

[5] GEG (2004). L’Aventure de Gaz Electricité de Grenoble – Cent ans d’énergie 1903-2003. Glénat. pp. 42-43

[6] GEG (2004). L’Aventure de Gaz Electricité de Grenoble – Cent ans d’énergie 1903-2003. Glénat. pp. 54-55

[7] Olivier Labussière (2014). « La performance énergétique des bâtiments à l’ère des politiques européennes de démonstration. Le cas du programme CONCERTO et du projet de la ZAC De Bonne (Grenoble, France). » [VertigO] n°143. Disponible sur : www.erudit.org

[8] Site : http://www.greenlys.fr

[9] Site : http://www.geg.fr/

[10] Site http://www.geg.fr/  Rubrique : « Nos Projets Smart Énergie »

 


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