L’énergie solaire photovoltaïque (PV) : une filière compétitive en site isolé

Parmi les filières de l’énergie solaire en plein essor, le photovoltaïque en site isolé présente un très grand intérêt. Le texte qui suit est extrait de l’ouvrage que l’auteur a publié sous le titre L’électrification solaire photovoltaïque dans le cadre des éditions Observ’ER, en octobre 2016. L’auteur et l’éditeur sont sincèrement remerciés de leur autorisation de reprise du texte par l’Encyclopédie.


Les systèmes de production d’énergie électrique à base de panneaux solaires photovoltaïques se sont largement démocratisés depuis le début des années 1980 conduisant à un coût du kWh produit très compétitif (Lire : Énergie solaire: les bases théoriques pour la comprendre).  Résultats : le marché des systèmes photovoltaïques connectés, autonomes et hybrides connaît un net accroissement d’intérêt. Plusieurs architectures se sont ainsi développées combinant onduleurs et panneaux photovoltaïques, unité de stockage, groupes électrogènes pour les systèmes hybrides et connexion réseau pour les systèmes réinjectant sur le réseau. L’intérêt de ce marché de ces systèmes de production d’énergie électrique photovoltaïque est largement renforcé par les préoccupations environnementales et son essor devrait donc encore se poursuivre (Lire : Solaire thermique et photovoltaïque : une brève histoire).

 

1. Historique du développement de l’énergie solaire photovoltaïque

Plusieurs décennies séparent les premières applications spécifiques du PV à la maturité technologique permettant un large accès à l’électricité.

1.1. Premières centrales isolées pour quelques applications bien spécifiques

L’effet photovoltaïque a été découvert en 1839 par le physicien français Antoine César Becquerel (Lire: Énergie Solaire : les bases théoriques pour la comprendre). Dès les années 1960, les premiers panneaux solaires équipent les satellites. Puis à partir de 1970, la France est l’un des premiers pays à promouvoir les applications terrestres en sites isolés : pompage solaire au fil du soleil en Afrique, alimentation de systèmes de télécommunications, balisage aérien et maritime, entre autres.

La baisse des coûts et l’augmentation progressive du rendement des modules photovoltaïques ont permis de diversifier les applications, en particulier pour les besoins d’électrification rurale. Dans les années 1980, la France a réalisé de nombreuses installations photovoltaïques autonomes pour l’électrification d’habitations, notamment dans les départements et territoires d’outre-mer. Des refuges de montagne ont été équipés en photovoltaïque : les modules solaires du refuge des Evettes, après plus de 35 ans d’utilisation dans des conditions difficiles, sont toujours en fonctionnement !

1.2. Développement du photovoltaïque raccordé au réseau et compétitivité du kWh produit

 

Fig. 1 : Décroissance du coût des panneaux photovoltaïques en fonction de la production ces 35 dernières années

 

Les années 1990 ont vu le développement du photovoltaïque raccordé au réseau, ce qui apparaissait, à l’époque, comme une aberration économique. Malgré tout, cette application s’est développée d’une manière exponentielle dans les pays du Nord, avec l’incitation financière des États pour développer cette filière très prometteuse, les résultats ont dépassé toutes les prévisions, puisqu’à présent dans certaines régions, le kWh d’origine photovoltaïque injecté sur le réseau présente le coût actualisé le plus faible par rapport à toutes les autres sources d’énergie. Historiquement, les systèmes autonomes étaient réservés, de par leur coût élevé, aux applications professionnelles pour lesquelles l’électricité était nécessaire et non substituable par d’autres sources (réseau, groupe électrogène). L’essor mondial des systèmes photovoltaïques raccordés au réseau constaté depuis le début du 21ème siècle a permis un changement d’échelle des filières de production et de diffusion des équipements, principalement les modules photovoltaïques et l’électronique de conversion associée. Le prix des modules photovoltaïques qui était de l’ordre de 29 € en 1980, est proche en 2016 du seuil symbolique de 0.5 €/Wc, soit une réduction de coût d’un facteur 50 (Figure 1). Par conséquent, le marché des systèmes photovoltaïques autonomes et hybrides connaît depuis quelques années un net accroissement d’intérêt, bénéficiant de la baisse des coûts et de la démocratisation des équipements, renforcé par l’accroissement constant des préoccupations environnementales et la hausse inéluctable des prix des énergies fossiles.

1.3. Maturité technologique du photovoltaïque permettant l’accès à l’énergie

Aujourd’hui, les systèmes photovoltaïques autonomes ou hybrides atteignent une phase de maturité technique et financière leur permettant d’être considérés comme compétitifs au regard d’une production par groupe électrogène, voire d’un raccordement au réseau public de distribution dans certains cas (Lire : Solaire photovoltaïque : technologies et trajectoires). II ne s’agit plus uniquement d’avoir recours à la technologie photovoltaïque par défaut, mais de considérer la production d’électricité solaire autonome comme une source économiquement viable et techniquement pérenne.

Le photovoltaïque est en mesure d’apporter une réponse à plusieurs défis :

On peut distinguer deux grandes applications du photovoltaïque selon que le système est raccordé au réseau public de distribution ou non. Les systèmes hybrides comportant d’autres sources d’énergie renouvelable que le photovoltaïque (éolien, micro-hydraulique…) ne sont pas abordés, bien que la démarche de conception soit semblable.

 

2. Systèmes photovoltaïques raccordés au réseau

Les systèmes PV raccordés au réseau sont avant tout des équipements de production destinés à produire de l’énergie électrique d’origine photovoltaïque qui va être injectée sur un réseau électrique alimenté par d’autres sources de production, à partir de machines tournantes de puissance beaucoup plus importante. On peut considérer deux architectures électriques de raccordement, selon que l’énergie produite est consommée sur le site de production (autoconsommation) ou non (injection totale). (Lire :Solaire photovoltaïque : technologies et trajectoires).

2.1. Systèmes PV raccordés au réseau avec injection totale

Ils peuvent être conçus sans ou avec stockage.

2.1.1. Injection totale sans stockage

 

Fig. 2 : Exemple de système photovoltaïque à injection totale sans stockage

 

Le principe de fonctionnement de ces systèmes est le suivant (Figure 2). Un générateur photovoltaïque transforme directement le rayonnement solaire en électricité. Le courant continu produit par les modules photovoltaïques est transformé, via un onduleur PV, en courant alternatif compatible avec les caractéristiques électriques du réseau public de distribution. L’énergie produite est intégralement injectée sur le réseau public de distribution afin d’être valorisée dans les meilleures conditions économiques pour le producteur. En cas de défaillance du réseau électrique (perte de tension ou tension et fréquence hors tolérance), l’onduleur PV s’arrête de fonctionner.

2.1.2. Injection totale avec stockage

 

Fig. 3 : Exemple de système photovoltaïque à injection totale avec stockage

 

Le principe de fonctionnement est le même que précédemment mais un stockage d’énergie par accumulateurs est intégré à la centrale de production (Figure 3). Toutefois, pour des raisons économiques, le stockage est très limité et a pour but de lisser la production et/ou de restituer l’énergie en fin de journée pour faire face à un pic de consommation sur le réseau électrique.

2.2. Systèmes PV raccordés au réseau avec autoconsommation

En autoconsommation, deux configurations sont possibles.

2.2.1. Autoconsommation sans stockage

 

Fig. 4 : Exemple de système photovoltaïque avec autoconsommation sans stockage

 

Le système photovoltaïque fonctionne comme précédemment mais il est connecté directement sur l’installation électrique intérieure du site (Figure 4). L’électricité solaire est autoconsommée par les récepteurs en service. L’excédent éventuel d’électricité solaire produit est injecté dans le réseau public de distribution. En cas de défaillance du réseau électrique (perte de tension ou tension et fréquence hors tolérance), l’onduleur photovoltaïque s’arrête de fonctionner et les récepteurs ne sont plus alimentés.

L’intérêt d’un tel système est le suivant :

  • pour le producteur/consommateur : réduction de sa facture d’électricité (surtout si le prix du kWh acheté au réseau est supérieur au coût de l’énergie photovoltaïque produite) et valorisation éventuelle du surplus d’énergie produite, si un tarif d’achat est institué ;
  • pour le gestionnaire de réseau : réduction de la fourniture d’électricité (tout ce qui est fourni localement n’est pas à produire par les autres sources généralement d’origine fossiles).

2.2.2. Autoconsommation avec stockage

 

Fig. 5 : Exemple de système photovoltaïque avec autoconsommation avec stockage

 

Le principe est le même que précédemment, mais un stockage d’énergie par accumulateurs est intégré au système, ce qui permet de stocker l’énergie produite par le générateur photovoltaïque en journée et de la restituer le soir pour la consommation locale (Figure 5). Cependant, pour des raisons économiques, le stockage est limité à quelques heures de fonctionnement et ne permet pas de s’affranchir totalement du réseau électrique.

L’intérêt d’un tel système est identique au précédent, mais avec un taux d’autoconsommation supérieur. De plus, en cas de défaillance réseau, cette configuration donne souvent la possibilité d’alimenter d’une manière autonome les récepteurs prioritaires pendant quelques heures, et assure ainsi une fonction de secours. Toutefois, ce système présente l’inconvénient d’un stockage électrochimique entraînant un coût d’investissement entretien, renouvellement, recyclage, entre autres.

2.3. Applications

On retrouve les systèmes photovoltaïques raccordés au réseau aussi bien au sol que sur des bâtiments d’habitation, tertiaires, agricoles et industriels. Les centrales de production électrique à base de générateurs photovoltaïques de grande puissance (de quelques MWe à quelques centaines de MWe) sont destinées à être raccordées directement sur le réseau public de distribution en Haute Tension A (HTA), ou sur le réseau de transport en Haute Tension B (HTB).

 

Ces systèmes (Figures 6 (a), (b), et (c)) comportent de nombreux points forts :

 

Fig. 6 : Exemples de centrales PV (a)

 

  • renforcement de la puissance électrique nationale installée,
  • soutien et service au réseau (fourniture de puissance active et réactive, contribution au plan de tension),
  • production d’électricité renouvelable à un coût compétitif par rapport aux solutions à base d’énergies fossiles et sans dégagement de gaz à effet de serre,

 

  • sécurité d’approvisionnement compte tenu de la disponibilité de la ressource locale de l’énergie solaire,
  • systèmes de production simples et rapides à mettre en œuvre et nécessitant une faible maintenance,
  • systèmes fiables, matures avec une durée de vie supérieure à 25 ans,
  • création d’emplois pour l’ingénierie, l’installation, le suivi et la maintenance.

En revanche, ils ont aussi quelques points faibles :

 

Fig. 6 : Exemples de centrales PV (b)Fig. 6 : Exemples de centrales PV (c)

 

  • nécessité d’un réseau fiable et stable pouvant supporter le raccordement de la centrale,
  • nécessité d’effectuer une étude spécifique du réseau local avant tout raccordement,
  • intermittence et variabilité de l’énergie solaire, d’où la nécessité d’un réseau sous tension en permanence alimenté par d’autres sources.

Les centrales photovoltaïques avec stockage se retrouvent essentiellement dans des territoires avec un réseau électrique de faible puissance (non interconnecté) et pour lequel le stockage permet de lisser les pointes de production ou de consommation.

 

3. Systèmes photovoltaïques non raccordés au réseau

Parmi les systèmes photovoltaïques non raccordés au réseau, on peut distinguer les systèmes autonomes fonctionnant sans autre source d’énergie que le photovoltaïque et les systèmes hybrides faisant appel à une ou plusieurs sources d’énergie complémentaires, d’origine renouvelable ou non du type éolien, hydraulique, groupe électrogène ou autres. Ces systèmes non raccordés au réseau sont conçus pour apporter avant tout un service aux utilisateurs. C’est pour cela que la notion de système photovoltaïque évoque l’ensemble des composants : production, stockage, gestion, conversion, distribution et utilisation. On peut distinguer les systèmes fonctionnant sans stockage (au fil du soleil) et les systèmes avec stockage par accumulateurs (Lire : Stockage d’énergies renouvelables sous forme d’hydrogène pour sites isolés et Les centrales villageoises photovoltaïques en Rhône-Alpes).

3.1. Systèmes photovoltaïques autonomes sans stockage

 

Fig. 7 : Schéma de principe d’un système PV autonome sans stockage (pompage au fil du soleil)

 

Ils fonctionnent de la façon suivante (Figure 7). En journée, le générateur photovoltaïque alimente l’utilisation directement ou via un convertisseur Courant continu/Courant continu (CC/CC) ou Courant continu/Courant alternatif (CC/AC). La puissance délivrée à l’utilisation est fonction de l’ensoleillement. Durant la nuit, l’utilisation n’est plus alimentée et donc est à l’arrêt. Les principales applications photovoltaïques fonctionnant au fil du soleil sont les suivantes : le pompage, la ventilation, la production de froid, le dessalement d’eau de mer, entre autres.

3.2. Systèmes photovoltaïques autonomes avec stockage

Leur principe de fonctionnement est le suivant. En journée, le générateur photovoltaïque alimente les récepteurs courant continu en fonctionnement et charge la batterie de stockage. Un contrôleur de charge évite la surcharge de la batterie en cas de surproduction solaire. Durant la nuit et par mauvais temps, les récepteurs sont alimentés par la batterie. Un limiteur de décharge protège la batterie en cas de décharge profonde. En présence de récepteurs fonctionnant en alternatif, un onduleur autonome convertit la tension continue en tension alternative, permettant ainsi leur alimentation.

3.3. Applications

 

Fig. 8 : Schéma de principe d’un système PV autonome avec stockage

 

On peut distinguer les systèmes photovoltaïques autonomes selon leur puissance et leurs applications (Figures 8 et 9 (a) et (b)) :

  • alimentation autonome de produits grand public (lampes solaires ou bornes de jardin) par générateur photovoltaïque de faible puissance,
  • électrification de bâtiments (de quelques centaines de watts à quelques kW) : résidence secondaire, écoles et centres de santé dans les pays en développement par kits photovoltaïques (Solar Home Systems – SHS),
  • alimentation d’applications professionnelles (de quelques dizaines de watts à quelques kW): signalisation, protection cathodique, télécom…

 

Fig. 9 : Exemples de SHS : « Solar Home Systems » (a)

Fig. 9 : Exemples de SHS : « Solar Home Systems » (b)

 

4. Systèmes photovoltaïques hybrides

On peut considérer deux architectures électriques de systèmes hybrides selon la présence ou non de stockage :

  • des systèmes photovoltaïques avec accumulateurs couplés avec une source d’énergie renouvelable (éolien, microhydraulique…) et/ou un groupe électrogène,
  • des systèmes photovoltaïques sans accumulateurs couplés avec des groupes électrogènes.

4.1. Systèmes photovoltaïque hybrides avec stockage

 

Fig. 10 : Exemple de système hybride

 

En journée, le générateur photovoltaïque charge la batterie et alimente simultanément l’onduleur, qui convertit la tension continue en tension alternative et permet l’alimentation des récepteurs fonctionnant en alternatif (Figure 10). Un contrôleur de charge évite la surcharge de la batterie en cas de surproduction solaire. Durant la nuit, l’onduleur est alimenté par la batterie de stockage. En cas d’insuffisance d’ensoleillement ou de plus forte consommation des récepteurs, un groupe électrogène de secours ou d’appoint permet l’alimentation directe des récepteurs et la recharge de la batterie pour assurer la continuité de service.

4.2. Systèmes photovoltaïques hybrides sans stockage

 

Fig. 11 : Exemple de système hybride

 

Les groupes électrogènes alimentent en permanence un réseau électrique de distribution. Le générateur PV injecte sur le réseau une puissance variable en fonction de l’ensoleillement. Toute l’énergie délivrée par le générateur PV n’est pas à fournir par les groupes électrogènes et réduit de fait la consommation de carburant et les coûts d’exploitation (Figures 11 et 12 (a) et (b)).

Les systèmes hybrides avec stockage (de quelques kW à quelques centaines de kW) sont très utilisés notamment pour l’alimentation d’habitations individuelles, de refuges de montagne, des relais de télécommunications de forte puissance, pour l’électrification villageoise. Les systèmes hybrides sans stockage (de quelques dizaines de kW à quelques MW) sont essentiellement utilisés pour l’électrification de gros villages et pour l’alimentation électrique de mines d’extraction de matières premières nécessitant une puissance élevée.

 

Fig. 12 : Exemples de systèmes hybrides (a)

Fig. 12 : Exemples de systèmes hybrides (b)

 


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