L’électricité : éléments essentiels, génération et transport

Alors que les manifestations de son utilisation (chaleur, éclairage, force motrice) sont faciles à appréhender, l’électricité en elle-même ne l’est pas. Il faut en effet passer par la compréhension de ses grandeurs fondamentales (tension, intensité, puissance) lesquelles renvoient aux principes de sa génération.


Fonctionnement des appareils ménagers et chauffage de l’eau ou des locaux ; actionnement de la quasi-totalité des machines dans les ateliers et les usines ; transport sur rail de tous types ; multiples moteurs électriques dans les véhicules à motorisation thermique mais aussi dans les bateaux et les avions ; télécommunications et imagerie médicale : impossible de se passer d’électricité dans une société moderne.

Mais qu’est-ce que l’électricité ? Son histoire (Lire : Histoire de l’électricité : de Thalès à la consommation du 21éme siècle) débouche sur des principes et des grandeurs fondamentales. Quelles sont-elles ? Comment l’électricité est-elle produite et transportée ?

 

1. Les grandeurs fondamentales de l’électricité

Le fonctionnement de tout appareil électrique peut être décrit à l’aide de trois grandeurs fondamentales : la tension (ou différence de potentiel), le courant électrique, la puissance. Chacune de ces grandeurs peut être appréhendée à partir de l’élément de base de l’électricité qu’est la pile.

1.1. La tension ou différence de potentiel

Fig. 1 : Schéma d’une pile

Soit une pile électrique représentée (Figure 1), identique à celle inventée par Volta, donc formée de deux bornes :

  • une borne négative N au sein de laquelle la concentration des électrons est excédentaire
  • une borne positive P où la concentration des électrons est lacunaire

La grandeur qui représente la concentration des charges est le potentiel électrique V.

La différence de concentration entre les bornes P et N fait apparaître une différence de potentiel notée Vp-Vn  qui est également appelée la tension électrique Upn.

C’est grâce à cette différence de potentiel que la pile est capable de mettre les électrons en mouvement lorsque le circuit est fermé par un conducteur. Cette capacité est alors appelée la force électromotrice de la pile.

Si la pile est reliée à un circuit extérieur, les électrons sont attirées par la borne positive où ils sont en déficit et ils sont repoussés par la borne négative où ils sont en excès. Les électrons circulent donc à l’extérieur du générateur de la borne négative vers la borne positive.

La force électromotrice comme la tension ou la différence de potentiel (V) sont exprimées en Volt.

1.2. Le courant électrique

Fig. 2 : Schéma d'un conducteur

La circulation des électrons produit ce qui est appelé le courant électrique. Ce dernier qui est composé d’un flux d’électrons, donc de charges négatives, circule dans le circuit en sens inverse des électrons et donc à l’extérieur du générateur de la borne positive vers la borne négative.

L’amplitude de ce courant électrique est caractérisée par le flux d’électrons par unité de temps et donc le nombre d’électrons par seconde qui passe dans la section du conducteur. Si l’on a un conducteur qui a la forme de la Figure 2 avec une section large (sur la gauche) et une section plus étroite (sur la droite), le débit des électrons sera le même à l’intérieur des deux section . Ce débit s’appelle l’intensité (I) du courant qui est exprimée en Ampères.

1.3. La puissance

Le courant et la tension sont la base du fonctionnement d’un appareil électrique et donc de son dimensionnement.

Par définition la puissance (P) est le produit des deux grandeurs que sont l’intensité du courant (I) et la tension (V), soit P = VI. L’unité de puissance est le Watt (W) mais cette unité étant assez petite, des multiples du W sont très utilisés :

  • Kilowat (kW)     =   1000 Watts
  • Mégawatt (MW) =  1000 Kilowatts
  • Gigawatt (GW)    =  1000 Megawatts

On les retrouve dans les ordres de grandeur du Tableau 1.

Tableau 1. Ordre de grandeur des puissances

 

Producteur Consommateur

(raccordé au réseau)

Consommateur

(hors réseau)

1 W  Pile Appareil en veille Téléphone portable
10 W  Pile HiFi, Lampe Basse Consommation Radio, PC portable
100 W  Batterie Ampoule, PC Tournevis électrique
1 kW Panneau solaire Radiateur, électroménager
10 kW  Grand panneau solaire Maison Traction véhicule électrique
100 kW Éolienne Groupe froid usine

Patinoire Grenoble (300kW)

Tram (350 kW)

Avion (150kW A330 – hors propulsion)

1 MW  Éolienne ou centrale solaire Éclairage Stade de France

Hôpital St Joseph

1 moteur de TGV
10 MW Centrale solaire Ville de 10000 habitants

Consommation électrique du porte avions CdG (16 MW – hors propulsion)

TGV
100 MW Turbine  thermique Ville de Grenoble: consommation 300 MW
1 GW 1 tranche centrale nucléaire, usine hydroélectrique, interconnexion France Angleterre (IFA 2000 – 2GW)
102 GW Consommation de pointe en France (60 Millions habitants)

 

 

2. Le principe des générateurs électriques

Fig. 3 : Schéma d'une bobine

La découverte d’Arago (Lire : Histoire de l’électricité : de Thalès à la consommation du 21éme siècle) assimile une bobine parcourue par un courant à un aimant permanent, ce que représente la Figure 3.

Fig. 4 : Aimant permanent et bobine

Cette correspondance sera très utilisée dans les machines électriques dont la partie tournante, génératrice de champ magnétique, sera soit un aimant permanent, soit, dans les machines les plus grosses, un électroaimant sous la forme d’une bobine. De même, sur la base des observations de Michael Faraday, les interactions entre un aimant mobile et une bobine peuvent être représentées par la Figure 4.

Un aimant qui se déplace au voisinage d’un circuit électrique, comme par exemple une bobine, engendre à l’intérieur de ce circuit un courant électrique qui circule en sens inverse du déplacement de l’aimant.  C’est ce phénomène qui permet de fabriquer les générateurs et les moteurs électriques.

Fig. 5 : Alternateur de bicyclette improprement appelé « dynamo »

Dans l’alternateur d’une centrale électrique, ce sont des électroaimants qui tournent à l’intérieur d’une bobine et qui engendrent un courant alternatif (dont le sens de circulation s’inverse périodiquement) à l’intérieur de la bobine raccordée à un circuit extérieur (Figure 5).

 

3. Le courant alternatif

Fig. 6 : Alternateur et courant alternatif engendré

La Figure 6 décrit schématiquement le fonctionnement de l’alternateur dans lequel l’électroaimant engendre un flux magnétique фf, qui traverse la bobine et qui  est donc variable en fonction de la vitesse de rotation de l’électroaimant. La loi dite de Lenz entraîne, par cette variation, la génération d’une force électromotrice qui s’oppose proportionnellement à la variation de фf. Cette force électromotrice suit donc la projection du champ générateur de  фsur la surface orthogonale à l’axe de la bobine ce qui est une fonction sinusoïdale. Lorsque la bobine est raccordée à un circuit extérieur, il en résulte un courant qui, comme la force électromotrice, va varier suivant une fonction sinusoïdale ce qu’illustre  la Figure 6. Ce courant est appelé le courant alternatif sinusoïdal.

 

4. Propriétés du courant alternatif

Fig. 7 : Courant alternatif sinusoïdal

Le courant alternatif est une grandeur variable dans le temps, selon une variation sinusoïdale qui est fonction de l’amplitude et de la fréquence (grandeurs physiques) et et de la phase  qui dépend de l’origine des temps. Il est caractérisé par la période qui est l’intervalle de temps entre deux maxima successifs et la fréquence qui est le nombre de périodes par unité de temps (Figure 7).

Fig. 8 : Formulation d’une tension alternative

Sa formulation mathématique (Figure 8) s’écrit :I= Im Sin (ωt +φ ) où ω représente la pulsation (ou vitesse angulaire de la génératrice) qui est liée à la fréquence f par la relation : ω= 2πf

La fréquence est une grandeur qui est constante sur toute l’étendue d’un réseau, car toutes les génératrices tournent à la même vitesse. Il y a deux grandes valeurs de la fréquence dans le monde :

  • 50 Hz dans les pays européens et ceux qui leur sont rattachés
  • 60Hz dans les pays d’Amérique du nord et ceux qui leur sont rattachés.

 

5. Le courant alternatif et le courant continu

Dans les systèmes électriques, le courant alternatif sinusoïdal est la forme la plus répandue de génération, transport et utilisation de l’énergie électrique. Il existe cependant une autre forme de courant et de tension sous laquelle l’énergie électrique peut être produite, transportée et utilisée : le courant continu. Sa caractéristique principale est, comme la tension, que son amplitude est constante dans le temps.

5.1. Application au niveau des récepteurs

A ce niveau, il existe deux types d’appareils :

  • Les appareils qui fonctionnent en courant alternatif directement sous la tension du secteur : les appareils d’éclairage,  de chauffage (four, réchaud, fer à repasser) et tous les récepteurs contenant des moteurs (lave-linge et lave-vaisselle, réfrigérateur, perceuse, mixer). De même dans l’industrie, tous les appareils fonctionnant avec des moteurs ou nécessitant une puissance importante sont alimentés en courant alternatif.
  • Les récepteurs électroniques (ordinateurs, chaîne Hi-Fi, téléphones portables) ne fonctionnent pas en courant alternatif mais uniquement en courant continu à basse tension. Ils fonctionnent à partir du courant alternatif de la prise du secteur grâce à un appareil spécial; appelé adaptateur, qui transforme le courant alternatif de la prise du secteur en courant continu. Dans la plupart des appareils électroniques (ordinateur, chaîne Hi-FI), l’adaptateur est intégré à l’appareil dont il constitue l’alimentation.

5.2.​ Histoire du développement du courant continu et du courant alternatif

La superposition de deux courants de nature différente comme le courant continu et le courant alternatif peut surprendre car elle implique des dispositifs de conversion pour utiliser l’un à partir de l’autre.

En fait cette existence est historique.  Les premières utilisations de l’électricité ont été dédiées à l’éclairage urbain, développé à New-York par Thomas Edison et à Grenoble par Aristide Bergès. Elles l’étaient en courant continu produit par des dynamos de type Gramme (Lire : Histoire de l’électricité : de Thalès à la consommation du 21éme siècle). La demande croissante de puissance pour alimenter les installations a conduit à une augmentation de l’intensité du courant qui nécessitait une augmentation du diamètre des conducteurs et donc de leur poids et de leur prix, ce qui entrainait une situation de blocage. C’est alors que l’on assista à l’apparition du courant alternatif produit par des alternateurs à champ tournant, en concomitance avec la découverte par Lucien Gaulard et Josiah Willard Gibbs du transformateur qui permettait de changer la tension en fonction des besoins. Il était alors possible de produire à basse ou moyenne tension puis, pour le transport, d’élever la tension pour limiter les pertes et la section des conducteurs et enfin, à l’utilisation, d’abaisser la tension pour l’adapter aux caractéristiques des appareils récepteurs.

C’est cette forme de courant que proposa Nikola Tesla. Pour des raisons commerciales, elle fut rejetée, par Thomas Edison qui électrocutait des animaux sur la place publique pour démontrer le danger des hautes tensions.

Ce fût néanmoins le courant alternatif qui, pour des raisons économiques et pratiques, l’emporta et devint la moyen universel de produire, transporter et dans la plupart des cas d’utiliser l’électricité.

Fig. 9 : Transport d'électricité à longue distance - Source : Spedona/JH Mora [CC BY-SA 3.0 (http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/)], via Wikimedia Commons

Aujourd’hui cependant les électriciens redécouvrent le courant continu grâce à l’évolution de la technologie qui permet de créer des installations à courant continu à haute tension, ce qui lui assure un regain d’intérêt pour le transport à longue distance ou pour des liaisons souterraines ou sous-marines (Figure 9).

 


L’Encyclopédie de l’Énergie est publiée par l’Association des Encyclopédies de l’Environnement et de l’Énergie (www.a3e.fr), contractuellement liée à l’université Grenoble Alpes et à Grenoble INP, et parrainée par l’Académie des sciences.

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