Décentralisation énergétique en France 1980-2010 : les collectivités locales entrent en scène

Décentralisation énergétique en France 1980-2010 : les collectivités locales entrent en scène

Sous l’effet des mutations du système énergétique et des lois de décentralisation du début des années 1980, les collectivités locales deviennent des acteurs de l’approvisionnement énergétique. Au delà de leur rôle de collectivités concédantes, elles créent des agences et des réseaux de plus en plus  actifs en termes de  demande et d’offre d’énergie.


Parallèlement aux mutations énergétiques et institutionnelles des deux dernières décennies du 20ème siècle et de la première du 21ème (Lire : Décentralisation énergétique en France 1980-2010 : les mutations énergétiques et institutionnelles), qui ont transformé les enjeux et les opérateurs de l’énergie, un long processus tendant à accorder aux différentes collectivités locales le principe de leur libre administration est enclenché depuis le début des années 1980. Il se poursuivra jusqu’aux années 2014. Dès lors les nouveaux enjeux énergétiques et climatiques se joignent à la reconnaissance de ce principe de libre administration pour inciter les collectivités locales à prendre des initiatives, nouvelles pour elles, dans le secteur de l’énergie.

 

1. L’accession des collectivités locales au statut de collectivités publiques autonomes

Trois étapes principales ont marqué le  long processus de décentralisation administrative[1] (Figure 1).

L’acte 1 de la décentralisation recouvre la période de 1982 à 1986 au cours de laquelle 25 lois (lois Deferre) ont été adoptées par le Parlement et 200 décrets pris par le gouvernement fixant les droits et libertés des communes, départements et régions. La coopération intercommunale sera ensuite renforcée avec les lois du 6 février 1992 et du 12 juillet 1999 (dites lois Chevènement).

L’acte 2 de la décentralisation concerne la période 2003-2004, puis les réformes des gouvernements Fillon/Sarkozy des années 2010-2012. Au cours de la première sous-période, une loi constitutionnelle relative à l’organisation décentralisée de la République, suivie de plusieurs lois organiques nécessaires à son application est adoptée en 2003 par l’Assemblée nationale et le Sénat réunis en congrès. Les régions acquièrent un statut consolidé. Enfin par la loi du 13 août 2004, des compétences nouvelles sont transférées vers les collectivités locales, parmi lesquelles celles du «développement économique, du tourisme, de la formation professionnelle ou concernant certaines infrastructures comme les routes, les aérodromes, les ports, en matière de logement social et de construction, d’enseignement ou de patrimoine[2].

C’est notamment sous l’effet de la crise économique et financière de 2008, que les élus nationaux se préoccupent davantage de régulation institutionnelle et financière et des coûts associés à ce qu’on appelle le mille feuilles administratif [3]. Au cours de la deuxième sous période, de nouvelles dispositions sont prises par une loi du 16 décembre 2010 sur les métropoles et pôles métropolitains, regroupements des départements et des régions, évolution d’une région et des départements qui la composent vers une collectivité unique, fusion de communes avec le dispositif des communes nouvelles[4]. Une autre réforme importante du gouvernement Fillon conduit en 2010 à la suppression de la taxe professionnelle et à son remplacement par une taxe de contribution économique territoriale (CET), à deux composantes, d’une part la cotisation foncière des entreprises (CFE) et d’autre part la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).

L’acte 3 de la décentralisation, enfin, sous la présidence de François Hollande, est marqué depuis 2012 notamment par le projet de regroupement des régions et par une tentative de clarification des compétences des six différents échelons , depuis l’État jusqu’aux communes, en passant par les régions, les départements et les intercommunalités. C’est ce nouveau défi de la rationalisation des modalités de coopérations intercommunales qui doit être relevé par les élus nationaux. Les divers chemins qui peuvent être empruntés pour parvenir à ce nouvel objectif de la décentralisation  impactent à leur tour les modalités de la future éventuelle décentralisation énergétique (Lire : Décentralisation énergétique en France 2010-2020 : la loi de transition énergétique).

Fig. 1 : Les avancées de la décentralisation. Source : Deuframat

 

2. Les initiatives des collectivités locales dans le secteur de l’énergie

Alors qu’elles ont acquis un statut d’acteur majeur et de plus en plus autonome dans leur gestion quotidienne, quelles positions les collectivités locales ont-elles atteint dans le domaine de l’organisation énergétique territoriale ?

En premier lieu, des évolutions législatives leur attribuent des compétences nouvelles mais encore limitées, parmi lesquelles on peut citer : les lois Grenelle 1 (Loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement) et Grenelle 2 (Loi portant engagement national pour l’environnement) promulguées respectivement le 3 août 2009 et le 12 juillet 2010 ; la loi portant Nouvelle organisation du marché de l’électricité (loi NOME) du 7 décembre 2010 ; la loi de Programme fixant les orientations et la programmation énergétique (loi POPE) du  13 juillet 2005 et la loi Solidarité et renouvellement urbain (loi SRU) du 13 décembre 2000.

En second lieu, ces collectivités locales  ne sont pas restées inactives. Elles ont pris des initiatives parmi lesquelles on peut identifier deux voies distinctes, mais non antagonistes, dans lesquelles  les collectivités locales ont progressé en direction de plus de responsabilités dans le domaine énergétique :

– d’une part à travers les efforts d’adaptation de la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) dans le cadre de ses relations, anciennes et traditionnelles avec l’opérateur historique Électricité de France (EDF), puis Électricité Réseau Distribution France (ERDF) qui continue à considérer la FNCCR comme son interlocuteur principal représentatif de l’ensemble des autorités concédantes ;

– d’autre part à travers la création de nouvelles institutions et de nouveaux outils d’expertise développés depuis les décennies 1980 par les collectivités locales pour faire face aux sollicitations de l’État attendant un engagement résolu de leur part dans la maîtrise de l’énergie, et le développement des sources d’énergie décarbonées, au premier rang desquelles les énergies nouvelles et renouvelables, puis les réseaux de chaleur.

Les avancées de ces deux catégories d’institutions sous contrôle des collectivités locales ont été facilitées par deux institutions publiques qui ne relèvent pas de l’échelon local, départemental ou régional. La première, l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME), sous tutelle et financement de l’État, a joué un rôle de soutien technique aux politiques gouvernementales, mais également de support technique, financier et institutionnel indirect, mais décisif,  aux collectivités locales dans le domaine énergétique. Cette institution-support, d’importance variable selon les orientations gouvernementales du moment, a joué un rôle incontestable dans l’émergence de nombreux outils énergétiques développés souvent en bonne intelligence avec les autorités locales. La deuxième institution-support, moins connue dans ce rôle,  a été l’Union Européenne qui a soutenu, dès les années 1980, par l’intermédiaire de la Commission européenne, à travers des co-financements, la création d’instruments tels que les agences locales d’information et certains plans énergétiques régionaux.

 

3. Les efforts d’adaptation de la FNCCR aux nouveaux défis énergétiques et climatiques

La FNCCR est de loin l’institution la plus ancienne dans l’accompagnement des collectivités locales dans le domaine énergétique, puisque sa création remonte à l’année 1934, mais dans un créneau bien spécifié au départ : celui d’accompagner et représenter les autorités organisatrices de distribution d’énergie adjudicatrices des concessions  dans leurs négociations complexes avec les compagnies d’électricité et plus tard EDF. Cette fédération regroupe deux types très différents de collectivités dans le cas des réseaux électriques : d’une part celles qui dans leur immense majorité concèdent la gestion de ces services à un délégataire de service public (EDF ou ERDF/ENEDIS) dans le cadre d’un cahier des charges unique, mais susceptible d’aménagements périodiques, et d’autre part celles très minoritaires de gestion directe en régie (Figure 2).

Fig. 2 : La FNCCR en congrès. Source : FNCCR

La FNCCR affiche traditionnellement trois objectifs :

-celle d’une « meilleure qualité des services publics locaux »,

-celle de la « maîtrise de leur gestion par les collectivités », avec la demande de reconnaissance d’une « efficience de la régulation locale que les collectivités exercent vis-à-vis des opérateurs »,

-et enfin celle « d’une indispensable solidarité entre les territoires » qui prend la forme d’un système de co-financement des investissements d’extension et de renforcement des réseaux électriques en zone rurale et de péréquation tarifaire ville/campagne.

Devant l’importance des mutations du secteur énergétique, la FNCCR étoffe directement ou indirectement ses services en créant, en 1992, l’Audit Expertise Conseil (AEC), puis, en 1996, Service Public 2000 (SP 2000). AEC se veut être un outil permettant aux autorités concédantes de «  vérifier la bonne application des contrats de délégation qu’elles concluent avec ses concessionnaires » et de les aider à préparer  « des avenants aux contrats de délégation de service public conclu sur la base des modèles ERDF-FNCCR et GrDF-FNCCR » et enfin d’accompagner « les collectivités dans toutes les étapes de la passation d’une convention de délégation de service public »[5]. Service Public 2000 est une structure de 50 personnes, c’est un « conseil au secteur public en ingénierie contractuelle et organisation des services publics locaux : de l’étude de faisabilité des projets à leur mise en exploitation, en passant par les choix de mode de gestion, la programmation, la rédaction et la négociation des contrats, la création de régies ou d’intercommunalités »[6] .

Ce n’est cependant que depuis 2007 que la FNCCR a élargi officiellement le périmètre de  ses compétences aux activités suivantes : « service public d’assainissement non collectif, déchets, communications électroniques, énergies renouvelables et MDE »[7]. Sa représentativité est élevée auprès des collectivités locales puisqu’elle compte plus de 600 adhérents, mais ce chiffre important est aussi un signe de faiblesse dans la mesure ou une grande majorité de ses adhérents ne dispose, malgré l’existence des deux structures relais AEC et Service Public 2000, que d’une taille et d’une capacité d’expertise juridique et technique beaucoup trop faible pour assurer un réel suivi technique et financier de leur maîtrise d’ouvrage. D’où une incitation de la loi du 7 décembre 2006 au regroupement de ces petites autorités concédantes à l’échelon minimum du département, ou de plusieurs départements contigus : le mouvement est engagé[8], mais encore loin de l’objectif affiché puisque selon le pointage de la Cour des comptes fait dans son rapport annuel de février 2013, il restait 736 concessions  à fin 2012, dont « 537 communales et 199 intercommunales ».

Cette résistance ou réticence au regroupement serait explicable, selon la Cour, dans les communes urbaines parce qu’elles considèrent que la problématique de la gestion de leurs réseaux n’a que peu de rapports avec celle des territoires ruraux. Par contre « les communes et syndicats ruraux souhaitent conserver la maîtrise d’ouvrage des travaux qu’ils réalisent ainsi que les recettes qu’ils peuvent percevoir dans le cadre du régime d’électrification rurale »[9]. Cette réticence des communes rurales est aiguisée par leur crainte qu’avec le mouvement de fond vers l’urbanisation et la péri-urbanisation, le périmètre des communes à régime d’électrification rurale ne se réduise inéluctablement. Pourtant, cet objectif de regroupement départemental devrait à l’évidence permettre une mutualisation des dépenses des syndicats intercommunaux ou mixtes qui sont aussi des maitres d’ouvrages d’investissements importants, une réduction de leur nombre, et donc in-fine une réduction des coûts de fonctionnement de ces services d’acheminement de l’électricité vers le consommateur final.

Mais le rôle essentiel de la FNCCR semble être celui d’exprimer « le point de vue collectif de ses adhérents, notamment lors de la préparation des textes législatifs et réglementaires et dans le cadre de négociations à caractère national avec des entreprises délégataires ». Compte tenu d’une part de la complexité de l’organisation technique, juridique et financière du modèle de concession existant entre collectivités concédantes et le concessionnaire obligé EDF puis ERDF, et d’autre part de l’existence du millier de concessions existant jusqu’en 2010, on imagine facilement que le renouvellement des modèles de contrat de concession est un évènement rare : depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, il ne semble s’être produit qu’une seule fois en 1992. Cependant des avenants ou protocoles d’accord permettent l’adaptation du modèle de contrat de concession, sous condition d’approbation ministérielle, et d’un quota minimum de signatures par 90% du nombre des 623 concessionnaires concernés pour que ERDF reconnaisse en avril 2014 l’applicabilité du dernier projet de protocole négocié avec la FNCCR le 18 septembre 2013.

Quelle esquisse de bilan peut-on dresser de ces contrats de concession et des protocoles d’accord ? Sans pouvoir remonter jusqu’à l’après-guerre, on peut partir de la période critique du livre blanc de la FNCCR en 2011[10], qui faisait suite à une période difficile notamment marquée par :

– la dégradation de la qualité de la fourniture électrique, en particulier dans les zones rurales ;

-le constat de multiples carences dans l’apport des informations minimales par le concessionnaire unique aux autorités concédantes, leur interdisant de fait un contrôle réel sur les prestations de l’opérateur délégué ;

 – des tensions entre la stratégie commerciale de l’opérateur historique soutenue par L’État, et les objectifs de maîtrise de l’énergie ou de valorisation d’énergies nouvelles et renouvelables portés par les territoires.

– et du côté des collectivités locales par un début de prise de conscience des inconvénients du manque d’intérêt porté à leur contrat de concession, pouvant aller jusqu’à l’oubli de son renouvellement lors de la date d’échéance (Figure 3).

Deux ans plus tard, lors du dernier Congrès de la FNCCR à Montpellier des 17 et 19 septembre 2013, intitulé Transitions [11], il n’était pas réaliste d’attendre qu’à cette date  des réponses satisfaisantes puissent être apportées aux trois catégories de difficulté mentionnées plus haut. Des progrès ont été notés quant à la qualité de la fourniture[12], après la détérioration des années 1995/2005, et quant aux perspectives d’accord avec ERDF pour réutiliser les supports de fils électriques comme support des nouveaux câbles télématiques. Simultanément, on remarque aussi une certaine répétition des griefs formulés par les délégués des autorités concédantes ou leurs experts à l’occasion de ce congrès, parmi lesquels l’opacité persistante des données transmises par le concessionnaire aux autorités concédantes, la non compréhension des mécanismes de la péréquation tarifaire entre l’échelon national et l’échelon local, l’incapacité du concessionnaire historique d’indiquer à ses autorités organisatrices concédantes son programme pluriannuel d’investissements futurs dans le réseau, du fait des pouvoirs discrétionnaires de son actionnaire unique, le groupe EDF dans sa filiale ERDF (Figure 3).

Fig. 3 : Signature d'un contrat de concession. Source : Twitter

 

4. La création de nouvelles institutions support et nouveaux outils d’expertise

Depuis le début de la décennie 1980, plusieurs initiatives ont été prises par les collectivités locales pour se doter de nouveaux outils d’expertise dans les domaines de l’énergie, en parallèle ou en concurrence avec ceux que la FNCCR a commencé à développer. Ces outils et institutions conseils sont de nature très diverses : ils rassemblent souvent des élus et des techniciens motivés par la recherche d’économies d’énergie et par la  valorisation des EnR sur leurs territoires. Sans prétendre à l’exhaustivité, quatre catégories paraissent identifiables :

– les agences régionales et les agences locales de l’énergie sous l’autorité de régions pour les premières, de collectivités intercommunales ou de communes pour les secondes ; ces agences se sont regroupées à l’échelon national respectivement dans le Réseau des agences régionales de l’énergie (RARE) et la Fédération des agences locales de maîtrise de l’énergie et du climat (FLAME) ;

– de nouveaux outils de mutualisation nationale de ces expertises locales, et de développement de ces instruments tels que l’association AMORCE, le réseau Energy-Cities  (réseau d’élus et de techniciens), les Conseils en énergie partagée (CEP) pour les petites collectivités locales, les Points d’information énergie (PIE) puis les Espaces Info Énergie (EIE) ;

– des fédérations et syndicats professionnels engagés dans le développement des EnR, donc dans la valorisation de potentiel énergétique local, souvent en relation avec les élus des collectivités locales ; parmi ces syndicats professionnels, la Fédération des Services Énergies Environnement (FEDENE), le Syndicat des énergies renouvelables (SER), la Fédération des énergies éoliennes (FEE), l’Association technique énergie environnement (ATEE) et ses clubs spécialisés, l’Association française des professionnels de la géothermie (AFPG), le Comité de liaison des EnR (CLER), Solaire collectif (SOCOL),  le Syndicat des professionnels de l’énergie (ENERPLAN), entre autres ;

-des associations nationales ou internationales dédiées à la protection de l’environnement, telles que World Wild life Fund (WWF) ou Fond mondial pour la Nature, le Réseau Action Climat-France (RAC-F), France Nature Environnement, Les Amis de la Terre, le Mouvement national de lutte pour l’environnement (MNLE) ou la Fondation Nicolas Hulot.

Parmi toutes ces institutions, certaines méritent un intérêt particulier.

4.1. Le Réseau des agences régionales de l’énergie (RARE)

Il regroupe 12 agences régionales employant 260 salariés qui interviennent dans les domaines suivants : « le développement durable, la commande publique, l’urbanisme, l’énergie, l’eau, la biodiversité, la mobilité, l’éducation sociale et solidaire, l’aménagement/urbanisme et la construction/rénovation»[13].

Trois formes d’intervention sont pratiquées :

« 1-Animation d’observatoires régionaux de l’énergie, du climat, de l’environnement ;

2-Accompagnement de porteurs de projets, animation territoriale, soutien technique au montage de projets des collectivités locales et des acteurs économiques et sociaux ;

3-Animation de réseaux de collectivités, de territoires, d’entreprises et de professionnels, éducation et formation dans les différents domaines de l’environnement et du développement durable »[14].

4.2. Les Agences locales de l’énergie et du climat (ALEC)

Selon la définition de la Commission européenne qui a soutenu leur création, une ALEC est « une organisation indépendante, autonome, à but non lucratif, créée à l’initiative des collectivités locales et de leur groupement, qui  bénéficie du soutien des pouvoirs publics locaux pour fournir des informations, des conseils et une assistance technique aux utilisateurs d’énergie (pouvoirs publics, citoyens, entreprises) et contribuer au développement des marchés d’énergie locales durables. Ces agences peuvent prendre la forme d’association à laquelle peut adhérer toute personne publique ou privée présente sur le territoire de son action »[15].

Les ALEC sont présidées par un élu, et « regroupent en leur sein des partenaires, acteurs, décideurs que sont les collectivités territoriales, les chambres consulaires, les associations de consommateurs ou de protection de l’environnement, les fédérations de professionnels, les producteurs et distributeurs d’énergie, les bailleurs sociaux » (Lire : L’action locale en faveur de l’efficacité énergétique).

Le réseau FLAM qui les regroupe a publié en 2013 une synthèse de leurs missions[16]. Ces agences locales sont passées de 13 en 2004 à 32 à fin 2013 (Tableau 1).

 

Tableau 1 : Agences régionales de l’énergie et Agences locales de l’énergie en 2013

 

Région Existence d’une Agence régionale de l’énergie : 12 régions dont 3 en Outre-mer 32 ALEC adhérentes au réseau FLAME en 2013
Alsace ALME- Mulhouse Sud Alsace
Aquitaine ALEC métropole bordelaise & Gironde
Auvergne ADUHME-Clermont Ferrand
Basse-Normandie Agence Manche Energie
Bourgogne ALTERRE Agence pour l’environnement et le développement soutenable en Bourgogne ALE de la NIèvre
Bretagne ALE du Pays de Saint Brieuc

ALEC du Pays de Rennes

ALECOB- Pays Centre Ouest Bretagne

ENER’GENCE- Pays de Brest
HEOL – Pays de Morlaix

ALOEN- Breatagne Sud

Centre ALE 37 (Indre et Loire)
Champagne-Ardenne ALE 08 (Ardennes)
Corse AAUC Agence de l’Aménagement durable, de planification et d’Urbanisme de la Corse

OEC Office de l’Environnement de la Corse Direction déléguée à l’ENnergie (DdEN)

 

La Guyane OREDD Observatoire Régionale de l’Energie et du Développent Durable de la Guyane
Haute-Normandie AREHN- Agence Régionale de l’Environnement de Haute Normandie ALEC 27 (Eure)
Ile de France ARENE Ile-de-France Agence Régionale de l’Environnement et des Nouvelles Energies Ile-de-France APC- Agence Parisienne du Climat

ALEC de Saint Quentin en Yvelines

ATEPS – Plateau de Saclay

GPSOE- Grand Paris Seine Ouest Energie

MVE- Est Parisien

ALEC Evry Centre Essonne

ALEC Plaine Commune

Languedoc- Roussillon ALE de Montpellier

LOZERE Energie

Lorraine ALE du Grand Nancy

ALEC du Pays Messin

Martinique AME Agence Martiniquaise de l’Énergie
Midi-Pyrénées ARPE Midi-Pyrénées l’Agence du développement durable ALEDA- Département de l’Ariège

QUERCY Energies

SOLEVAL- Sicoval  Sud Est Toulousain

Nord-Pas-de-Calais CERDD -Centre Ressource du Développement Durable
Poitou-Charentes AREC PC Agence Régionale de l’Évaluation environnement Climat Poitou-Charentes
Provence-Alpes-Côte-d’Azur ARPE- Agence Régionale Pour l’Environnement Provence-Alpes-Côte d’Azur ALE de la Métropole Marseillaise
La Réunion ARER Agence Régionale de l’Énergie Réunion
Rhône-Alpes RAEE Rhônalpénergie-Environnement ALE Agglomération Lyonnaise

ALEC de l’agglomération grenobloise et AGEDEN

ALEC 42 ( Loire)

Source : pour les Agences locales de l’énergie : http://www.federation-flame.org/wp content/ uploads/ 2013/ 05/ vademecum -flame.pdf; Pour les Agences Régionales de l’énergie : http://www.rare.fr/author/raee/

 

À contrario, sur le total des 23 régions dans leur configuration actuelle, donc avant un éventuel  regroupements en 13 grandes régions, on constate  que 10 d’entre elles n’ont pas encore voulu se doter d’une Agence régionale de l’énergie comme outil de coordination des initiatives locales, même si certaines d’entre elles peuvent avoir une partie de leurs services internes dédiée à cette fonction d’expertise énergétique : Lorraine, Picardie, Languedoc Roussillon, Champagne-Ardenne, Centre, Bretagne, Basse-Normandie, Auvergne, Alsace, Aquitaine.

4.3. L’association AMORCE

Il s’agit « d’une association nationale des collectivités, des associations et des entreprises pour la gestion des déchets, de l’énergie et des réseaux de chaleur » rassemblant en 2014 805 adhérents, dont 548 collectivités, regroupant 55 millions d’habitants, et 257 professionnels, soit une progression remarquable (Figure 4)  depuis sa création en 1987 avec 50 adhérents.

Fig. 4 : Evolution des adhérents d’AMORCE

Le dynamisme d’AMORCE se manifeste aussi par ses contributions remarquées[17] dans les grands débats nationaux (Grenelle de l’environnement, Conférence environnementale ou
Débat national sur la transition énergétique, Plan national des déchets). Une des pistes privilégiées dans les travaux de cette association consiste à « mettre en évidence les leviers d’actions dont disposent les collectivités au travers de leur compétence d’autorité organisatrice de la distribution d’énergie pour mieux développer la maîtrise de l’énergie et les énergies renouvelables ».

Après des travaux spécifiques avec les syndicats d’énergie adhérents en 2008, ce sujet important est remis à l’ordre du jour en 2012 avec un colloque organisé en partenariat avec la FNCCR, l’Association des Maires de France (AMF), l’Assemblée des Communautés de France (AdCF), l’Association des Maires de grandes villes de France (AMGVF) et l’Association des communautés urbaines de France (ACUF) pour mettre en évidence comment la compétence d’autorité organisatrice de la distribution d’énergie peut être utilisée dans les politiques énergie-climat locales. Une réflexion menée avec un petit groupe d’experts vise à identifier les leviers et les freins au développement de la MDE et des EnR dans l’activité des concessionnaires de réseaux d’électricité, de gaz et de chaleur jusqu’à l’horizon 2020 [18].

4.4. Assises nationales de l’énergie des collectivités territoriales

Les Assises sont une rencontre annuelle de deux à trois journées, initiées début 2000 par les communautés urbaines de Dunkerque et de Grenoble-Alpes-Métropole. Autour de ces organisateurs historiques, un comité de préparation s’est progressivement constitué rassemblant aujourd’hui une quarantaine d’organisations, dont « des partenaires financiers, des institutions, des administrations, des entreprises et des associations représentants les élus locaux et ayant une action dans les domaines de l’énergie »[19]. Ce comité « discute des sujets à débattre en adéquation avec l’actualité et met en évidence le point de vue des autorités locales et des élus ».

Depuis les premières Assises tenues en 2000, quatorze autres ont été organisées chaque année jusqu’en 2014. Les thématiques traitées lors des réunions de deux à trois jours ressortent bien à la lecture des titres de chacune d’entre elle (Tableau 2). Dans un cadre de référence de plus en plus affirmé de décentralisation énergétique, elles privilégient le rôle des collectivités locales dans la maîtrise de l’énergie, le développement des EnR et des réseaux de chaleur.

 

Tableau 2 : Thématiques des Assises de l’Energie et des Collectivités Territoriales

 

Année et lieu Thématique
16ème 27-29 janvier 2015- Bordeaux « Transition énergétique- Tous concernés : faisons là ensemble »
15ème 28-30 janvier 2014- Dunkerque La transition énergétique : Une opportunité de développement pour les collectivités territoriales
14ème 29-31 Janvier 2013- Grenoble Les  territoires au cœur de la transition énergétique
13ème 2012

Dunkerque

(Audience :1476)

Édition 2012

Energy Cities et l’ADEME deviennent co-organisateur

12ème 2011

Grenoble

(Audience :1200)

Urbanisme et mobilité
11ème 2010

(Audience :1100)

Objectifs de 2020 : Les territoires en route vers les objectifs de 2020 : comment faire en 10 ans ?
10ème 2009

(Audience :1000)

Comment imaginer un futur désirable des territoires qui soit compatible avec les nouvelles exigences nationales, européennes et mondiales ?
9ème 2008

(Audience :1100)

Politique locale 2008-2014 : Quel programme local pour l’énergie et le climat ?

 

8ème 2007 Mobiliser les acteurs Énergie, question de société ! Collectivités et acteurs locaux : Comment mieux travailler ensemble ?
7ème 2006 Bâtiments d’aujourd’hui et de demain, les collectivités territoriales en action…
6ème 2005 Gestion de l’énergie  La collectivité territoriale, une consommatrice d’énergie avisée et responsable
5ème 2004 Ouverture des marchés  Les collectivités locales à l’heure de l’ouverture des marchés de l’énergie Comment tirer parti de l’expérience européenne ?
4ème 2003 Production décentralisée- Énergie, production décentralisée et développement durable des territoires… Et demain ?
3ème 2002 Mobilité urbaine  -Énergie, mobilité urbaine… demain quelles responsabilités pour les collectivités locales ?
2ème 2001 Habitat, demain Énergie, habitat… demain quelles responsabilités pour les collectivités locales ?
1ère 2000 Politique locale : Politiques énergétiques et collectivités locales à l’heure européenne ?

 

4.5. Association Energy Cities

Depuis 2012, l’association Energy Cities s’est mobilisée pour formuler des recommandations visant à accélérer la transition énergétique des territoires de l’Union Européenne. Par transition énergétique elle entend « le passage d’un système dominé par les énergies de stock (fossiles et fissiles) à un système basé sur des énergies de flux (renouvelables). Cela nécessitera de mener simultanément des actions ambitieuses de réduction de nos consommations d’énergie »[20]. Dans la version la plus récente de ces recommandations, de janvier 2014 , l’association énonce huit propositions qui structurent la politique territoriale de l’énergie :

« 1-Assumer la responsabilité de l’approvisionnement énergétique de son territoire ,

2- Réunir tous les acteurs au sein d’une alliance pour l’énergie locale ;

3- S’assurer que les budgets publics intègrent les externalités énergétiques positives et négatives ,

4-Co-construire une vision de long terme qui modèle toutes les politiques,

5-Résorber la précarité énergétique locale,

6-Montrer l’exemple en transformant la gestion énergétique municipale,

7- Élaborer un plan d’action pour la transition énergétique ,

8- Participer aux réseaux régionaux, nationaux et européens pour s’ouvrir aux expériences des autres ».

L’association reconnait les difficultés de mise en œuvre de ces orientations dans les pays « à l’Ouest, à l’Est et au Sud, [de l’Union Européenne dans lesquels] les autorités locales n’ont pas cette compétence. Celle-ci a été un monopole d’État, avant de devenir ici ou là un monopole privé. » Pour ces pays, les conseils ou préconisations de l’association sont :

1°) de « Revendiquer cette compétence en s’appuyant sur l’expérience des pays où ça marche. » et

2°) d’ « Utiliser les “niches” de responsabilité rendues possibles par la législation existante ».

 

5. Conclusions

Dans ces domaines de l’énergie, malgré leurs nouvelles compétences, malgré les nombreuses sollicitations dont elles ont été l’objet et malgré un effort important de leur part pour y répondre avec de nouveaux outils et institutions supports, les collectivités locales ne sont pas parvenues à atteindre un statut équivalent à celui acquis dans leurs autres domaines d’intervention.

Une part de l’explication tient aux caractéristiques d’un secteur où les contraintes d’approvisionnement et d’organisation des marchés énergétiques nationaux et européens ainsi que celles de cohérence technique des réseaux de transport et de distribution sont très fortes, alors même que le degré d’expertise et leur souhait de s’engager résolument dans cette direction sont très inégaux selon les collectivités concernées. Une autre partie de l’explication réside dans les difficultés de mise en œuvre de la transition énergétique (Lire : Décentralisation énergétique en France 2010-2020 : la loi de transition énergétique).

 


Notes et références

[1] Pour plus de détails historiques on peut se reporter au site suivant de la DGCL- Ministère de l’Intérieur : http://www.collectivites-locales.gouv.fr/decentralisation

[2] Source DGCL, op .cit. http://www.collectivites-locales.gouv.fr/decentralisation

[3] La DGCL rappelle qu’en 2010 on comptait en France : 36 783 communes, 100 départements, 22 régions, 15 900 syndicats intercommunaux, 371 pays, 520 000 conseillers municipaux, 1 880 conseillers régionaux, 4 180 conseillers généraux.

[4] Source DGCL, op .cit. http://www.collectivites-locales.gouv.fr/decentralisation

[5] Source : Audit Expertise Conseil, http://www.aeconseil.fr/index.php?menu=1

[6] Source : Service Public 2000, http://www.sp2000.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=59&Itemid=59

[7] Source : FNCCR : http://www.fnccr.asso.fr/fnccr/historique.html

[8] Selon le Rapport public annuel 2013 de la Cour des Comptes (Les concessions de distribution d’électricité : une organisation à simplifier, des investissements à financer),  ERDF gérait 1025 concessions en mars 2010, et 736 à fin 2012.

[9] CDC, op.cit.p.110

[10] FNCCR , 2011, Livre blanc. Quel mode de gestion pour les services publics locaux de l’électricité ?

[11] Source internet : http://www.congresfnccr.weavent.fr/

[12] Selon le rapport de la Cour « le temps de coupure moyen en France s’élevait à 86 minutes en 2009 et 85,2 minutes en 2010, avant de descendre à 71 minutes en 2011 ; il était de moins de 50 minutes en 2000 » (p.123)

[13] RARE (Réseau des Agences Régionales de l’Energie et de l’Environnement), 2014, Candidat (e) aux élections municipales- Le Développement durable : une opportunité à saisir, Livret d’accompagnement de 10 pages, http://www.rare.fr/le-reseau-rare/les-agences/un-objectif-commun

[14] Rare. Op.Cit. Le réseau RARE s’est manifesté par une publication de référence : Candidat (e) aux élections municipales- Le Développement durable : une opportunité à saisir.  Livret d’accompagnement de 10 pages.

[15] FLAME http://www.federation-flame.org/les-alec-en-france/quest-ce-quune-alec/

[16] FLAME (2013). L’agence locale de l’énergie et du climat, un outil essentiel pour la mise en œuvre de politique énergétique et climatique territoriale , 21 pages. http://www.federation-flame.org/wp-content/uploads/2013/05/vademecum-flame.pdf

[17] AMORCE, 2008, L’élu, l’énergie et le climat, L’essentiel de ce que les collectivités territoriales doivent savoir,

L‘élu et la performance énergétique des bâtiments,  Guide 04/2009, L’élu et les réseaux de chaleur- Guide 02-2012, Compétences Energie- Climat des collectivités : éléments pour un meilleur partage des actions sur le territoire, Soutiens financiers aux énergies renouvelables et à la maîtrise de l’énergie ; Coûts et enjeux pour les collectivités- Etude 12/2010, etc… Pour la liste complète de ces documents de référence, se reporter à http://www.amorce.asso.fr/fr/energie/projet-de-loi-sur-la-transition-energetique/

[18] AMORCE : Feuille de route 2020 : AMORCE, Approvisionnement et distribution énergétiques : feuille de route pour 2020 Quel avenir pour l’approvisionnement et la distribution d’énergie en tant que leviers de développement territorial de la maîtrise de la demande en énergie et des énergies renouvelables ? Série Politique ENP 32, Octobre 2013, 92 p.

AMORCE, 2014, Etude- Soutiens financiers aux énergies renouvelables et à la maîtrise de l’énergie, Coûts et enjeux pour la collectivité, Série Politique ENP 34 , Septembre 2014, 44p.

http://www.amorce.asso.fr/IMG/pdf/enp_32_distribution_feuille_de_route_2020.pdf

[19] Source : site internet des Assises Nationales de l’Energie : http://www.assises-energie.net/fr/qui-sommes-nous/organisation/index.html

[20] Energy cities, Association Européenne des autorités locales en transition énergétique, mise à jour Janvier 2014, 30 propositions pour la transition énergétique des territoires, 52 p., site internet : www.energy-cities.eu/30propositions

 


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