Cogénération et stockage saisonnier de la chaleur pour habitat-tertiaire

Dans une politique d’efficacité énergétique, la cogénération devrait s’imposer puisqu’elle permet de récupérer une partie de la chaleur perdue lors de la production thermoélectrique. Pourquoi ne se développe-t-elle pas au rythme souhaité ? Un stockage saisonnier de la chaleur lèverait-il les obstacles ? 


L’usage de chaleur de cogénération, en réponse à la demande de chaleur pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire (ECS) de l’habitat et du tertiaire à une échelle significative, semble possible sur le plan quantitatif mais très peu de grandes réalisations existent de par le monde.

Au vu de cette bizarrerie, alors que la réduction des émissions de CO2 est une urgence et que le coût des énergies fossiles est élevé, il apparait que le profil temporel de la demande de chaleur, demande fortement concentrée en hiver et soumise à d’importantes fluctuations rapides, rend cette option peu attractive. Les principaux inconvénients associés à cette forte saisonnalité de la demande semblent être les suivants :

  • sans stockage saisonnier de chaleur, la cogénération ne serait exploitable que pendant cinq mois de l’année obligeant à changer de mode de fonctionnement de la centrale de production électrique deux fois l’an ;
  • la perte d’électricité associée à la cogénération, perte de 1MWhe pour 6 MWh de chaleur cogénérée à 135°C, serait concentrée en hiver, alors qu’à cette saison  la production d’électricité est soumise à de très fortes contraintes ;
  • les conditions de transport de chaleur sur des distances, de l’ordre de 100 Km, sont durcies par cette forte saisonnalité, car le caloduc nécessaire au transport de chaleur ne serait utilisé qu’environ cinq mois par an ;
  • il semble enfin difficile de moduler la puissance pour s’adapter précisément à une demande fortement variable.

Un stockage saisonnier de chaleur (SSC) dimensionné et utilisé de façon optimale, pour une consommation donnée, permettrait-il de rendre constante durant l’année, la fourniture de chaleur de cogénération, de diminuer ainsi de façon sensible la baisse de production électrique pendant la période la plus critique de l’hiver, d’utiliser au mieux les investissements liés au transport de chaleur sur de longues distances ? Si un SSC peut être réalisé à un prix raisonnable, pourrait-il rendre attractif un usage massif de chaleur de cogénération ? Cette problématique est discutée et analysée dans l’optique d’un usage potentiel très important à l’échelle de 100  à 200 TWh/an en France.

 

1. Mix énergétique,  fonction et capacité  d’un SSC

Fig. 1 : Demande annuelle de chaleur, chauffage et ECS (Etot-1an), un exemple concret.

Le profil annuel de la demande de chaleur met en évidence de fortes fluctuations au niveau de quelques heures ou de quelques jours (Figure 1). Répondre aux variations rapides de ces demandes de chaleur s’avère très difficile avec de la chaleur de cogénération. Ceci conduit à proposer, dans un premier temps, que 30 % de la chaleur annuelle soient fournis par des chaudières à combustible, ce qui constitue aussi un élément de sécurité d’approvisionnement.

Fig. 2 : Illustration de la fonction SSC et de l’usage des chaleurs de cogénération et issues de chaudières, au cours de l’année.

Sur la Figure 2 ci-dessous, le profil de la demande de chaleur a été lissé et apparait en épais tirets rouges. On peut observer comment un stockage saisonnier de chaleur permet une fourniture de chaleur cogénérée à puissance constante durant toute l’année.

On observe que la chaleur de cogénération est livrée sur le site de l’agglomération à puissance constante (aire hachurée en grands losanges à traits noirs).  L’excédent de chaleur, après ponction de la consommation pour l’ECS de mai à octobre, est à stocker. Cette chaleur est déstockée et réutilisée en début de période de chauffe. L’usage de la chaleur produite par les chaudières vient compléter les besoins de chaleur durant cette même période de chauffe. La capacité de stockage du SSC qui est déterminée à partir du profil de consommation est ici de 20% de Etot-1an. On notera sur cette Figure 2, que le déstockage est accéléré autant que possible pour avoir un stockage complètement vidé de sa chaleur»  fin mars, condition nécessaire pour la reproductibilité des caractéristiques du stockage (voir plus loin).

 

2. Dimensionnement d’un équipement pour 500 000 habitants (0,5 E6 habitants)

La quantité de chaleur consommée annuellement en France, pour le chauffage et l’ECS de l’habitat et du tertiaire, qui est actuellement d’environ 500 TWh (chauffage) et 80 TWh (ECS), est supposée être réduite à 333 TWh pour le chauffage grâce à une isolation modérée (facteur moyen de réduction de 1,5), la consommation pour l’ECS restant inchangée. La quantité de chaleur totale consommée annuellement au niveau national, pour le chauffage et l’ECS, devient donc égale à 413 TWh (Lire : Les besoins d’énergie et La réhabilitation thermique dans le bâtiment en France).

Dans ce contexte, on a choisi de dimensionner une installation pour 500 000 habitants dont 70 % des besoins en chaleur seront fournis par de la chaleur de cogénération, le reste provenant de chaudières. Ses caractéristiques peuvent être résumées ainsi :

  • une chaleur consommée totale pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire : Etot-1an  = 3,17 E6 MWh/an (= 413 E6 * 0,5 E6/65 E6) composée de  70% de chaleur cogénérée (2,22 106 MWh /an à puissance constante) et 30 % de chaleur issue de chaudières (0,95 106 MWh/an pour  faire face aux fluctuations rapides) ;
  • un transport de chaleur «cogénérée» par caloduc sur 100 km, soit une puissance de 250 MW sur 12 mois via 2 tubes  Φ≠1 m veau = 1m/s  ΔT=85°C, pertes thermiques ≤ 5% ;
  • une quantité de chaleur à stocker sur 5 mois : (20% de Etot-1an) → 0,634 106 MWh/an à des températures de T-chaud = 135°C et T-retour = 50°C ;
  • des capacités de stockage de ≠ 0,07 MWh utilisable/m3 d’eau ou de ≠ 0,03 MWh utilisable par m3 de sol, soit  ≠ 10 millions m3 d’eau ou ≠ 20 millions m3 de sol (granit).

Le réseau de distribution de chaleur aux bâtiments de l’agglomération, appelé aussi réseau de chaleur, est une installation classique qu’il n’est pas nécessaire de décrire de même que le caloduc qui doit transporter la chaleur de cogénération de la centrale électrique de production au lieu de consommation de chaleur, ce qui est parfaitement possible sans pertes thermiques excessives. Reste donc le problème du SSC.

La très grande quantité de chaleur à stocker ne peut pas relever de solutions utilisant un matériau spécial, même à grande capacité calorifique, pour des raisons de coût ou de nuisances potentielles. L’eau ne convient pas non plus comme matériau de stockage de masse, eu égard au danger potentiel que constitue une eau surchauffée à 135°C (et  P>3bars) qui peut se déplacer naturellement et représenter alors une menace importante. D’où le choix d’un stockage de chaleur dans le sol, sol qui est supposé ici avoir des propriétés thermiques identiques à un sol granitique.

 

3. Principe du stockage dans le sol et description de son utilisation

Fig. 3 : Principe de circulation du caloporteur dans une série de puits pour le déstockage (et le stockage de chaleur avec flèches inversées) dans le sol

En vue de stocker une grande quantité de chaleur dans un grand volume de sol, et ce, de façon économiquement viable, il est proposé que le stockage saisonnier  fonctionne de la façon suivante : la chaleur est transférée au sol par l’intermédiaire de puits forés sur une profondeur utile de 100 m avec un diamètre de l’ordre de 30 cm et selon une maille, telle que 1000 m3 soient associés à chaque puits, ce qui correspond à un entraxe entre puits de l’ordre de 3,6 m.

Au cours de la phase de stockage, l’eau chaude à refroidir est injectée à 135°C en haut et en périphérie du puits. Celle-ci descend lentement vers le fonds du puits,  cédant sa chaleur au sol environnant le puits. Cette eau remonte rapidement par un tube de faible diamètre (# 0,06m) vers le sommet du puits. La chaleur est ainsi transférée au sol environnant par la surface externe du puits. Il parait préférable que le transfert de chaleur entre le tube central et l’eau périphérique soit rendu aussi faible que possible. L’étude a été conduite en supposant que le fluide caloporteur est refroidi par passage dans une série de 40 puits avec un branchement entre puits comme indiqué sur la Figure 3.

Fig. 4 : Vue de dessus d’un ensemble de séries de puits dans lesquelles circule un liquide caloporteur (eau)

Pour le déstockage de chaleur, le caloporteur injecté à 50°C au fond du puits par le tube central, remonte lentement en périphérie et ce dans une série de 10 à 40 puits pendant les cinq mois de déstockage. Le liquide caloporteur ressort réchauffé à 135°C maximum. Lorsque la température en sortie du déstockage devient inférieure à 135°C, alors le caloporteur est réchauffé à 135°C grâce aux chaudières avant d’être envoyé dans le réseau de chaleur (Figures 3 et 4).

Les puits sont répartis selon un pavage hexagonal et extraient (ou transfèrent) la chaleur de (ou vers) chacun des volumes hexagonaux dont ils sont les axes.

 

4. La thermique du SSC : étude par simulation numérique des phases de déstockage et stockage

Plusieurs conditions et approximations sont à la base de la simulation numérique. Une série de 40 puits a été considérée comme un seul tube de 4000 m, les échanges thermiques entre tube central et reste du puits ont donc été négligés. Il en est allé de même des transferts de chaleur entre les volumes hexagonaux de sol associés à chaque puits, ce qui parait justifié. Les calculs ont été faits avec différentes valeurs pour le diamètre des puits de 200 à 500 mm et pour la distance  entraxe entre puits d’un réseau hexagonal de 2 à 3,6 m.

La simulation, dont les principaux résultats sont présentés ci-dessous, a pour but :

  • de visualiser et comprendre la progression du stockage au cours des cinq mois dédiés au stockage,
  • de quantifier le remplissage du stockage par rapport à sa capacité théorique,
  • d’observer comment s’opère le déstockage dit accéléré,
  • d’obtenir une estimation du pourcentage de l’énergie récupérée,
  • d’observer la reproductibilité des cycles de stockage déstockage.

4.1. Énergie en stock (kWh) dans 40 puits, variation sur deux années et résultats de simulation

Fig. 5 : Energie en stock dans 40 puits exploités en série sur 2 ans

Les 40 puits sont exploités en série (Figure 3sur deux ans pour différents diamètres de puits et différentes vitesses de circulation d’eau. Soit la variation de l’énergie stockée au cours de deux années de fonctionnement du SSC en partant d’une situation initiale où le stockage est rempli à 100 % de sa capacité théorique (Figure 5). Les vitesses de l’eau circulant dans les puits dépendent du diamètre des puits. Pour le déstockage, cette vitesse est pilotée par la demande chaleur : lorsque le caloporteur sortant du stockage n’est plus à 135°C, il est réchauffé à 135°C par les chaudières avant d’être injecté dans le réseau de chaleur. On notera que d’une année sur l’autre, la quantité effectivement stockée ne varie pas et qu’en fin de déstockage, la quantité de chaleur restante dans le volume de stockage est négligeable. Le système revient donc à Estockée=0 chaque année en fin de déstockage. 

Plusieurs propriétés et particularités importantes sont observées sur la Figure 5 :

  • la quantité stockée maximale est de l’ordre de 80% de la capacité théorique et dépend assez peu de la section des puits ;
  • le  déstockage est accéléré autant que possible pour que le puits et son environnement de 10 à 20 m2 de sol soit refroidi rapidement ; le profil de la vitesse d’extraction de chaleur, ou déstockage, est régulé par la demande de chaleur du réseau ;
  • le stockage (vitesses négatives) se fait essentiellement à puissance constante.

4.2. Visualisation de la thermique d’une série de 40 puits en fin de période de stockage.

Fig. 6 : Résultats de simulation numérique  et visualisation de la répartition axiale et longitudinale des températures par code de couleur dans le puits de h= 4000 m et son volume de sol associé, 1 mois avant la fin du stockage et en fin de stockage.

La simulation a été faite avec une capacité de stockage théorique égale à la quantité de chaleur à stocker. Dans la réalité, la capacité de stockage réelle sera de 20 à 30 % supérieure pour éviter qu’une trop grande partie de la chaleur à stocker ressorte du volume de stockage (Figure 6).

Il apparait qu’une partie de l’eau à 135°C, envoyée dans le stockage, ressort des 40 puits non encore complètement refroidie (voir code couleur dans le puits en bas de la figure) ce qui au total, correspond à environ 20% de l’énergie stockée. En augmentant la capacité de stockage de 20 %, cette proportion diminue à environ 8 %. On peut penser que cette eau non complètement refroidie pourra être envoyée à la centrale de production, sinon elle devra être refroidie. Ce problème ne parait  cependant pas d’une importance majeure. À ce point, il semble important de mentionner que la vitesse de déstockage peut être modulée de plus ou moins 25% à l’échelle de 10 ou 20 heures sans impact sur les propriétés thermiques du stockage, ce qui établit la possibilité d’une contribution notable du SSC à la satisfaction d’une demande rapidement variable.

4.3. Points sur la technologie du stockage restant à étudier

Fig. 7 : Coupe horizontale d’un puits et coupe verticale selon un diamètre

Sans encore d’études significatives sur ce sujet, une idée peut être avancée : elle consisterait à partir de la technologie de la géothermie semi profonde. Cette technologie utilise deux tubes en U qui assurent l’échange entre eau et sol. Ces deux tubes en U sont introduits dans le forage par gravité. Un ciment spécial est ensuite coulé dans le puits, ciment qui assure le contact thermique sol-tubes. Pour l’application SSC, on ajouterait dans chaque puits, un tube central pour injection d’eau froide ou extraction d’eau refroidie au fond du puits (Figure 7). Une vérification expérimentale des propriétés thermiques d’un tel système serait requise. Il conviendrait alors de développer des matériaux adaptés aux températures utilisées de façon cyclique entre 50 à 135 °C.

Mais d’autres développements seraient aussi nécessaires :

  • optimisation de la thermique par simulation, choix de l’entraxe et diamètres des puits et enfin vérification expérimentale des caractéristiques thermiques  avec un assemblage qui pourrait compter sept puits par exemple ;
  • conception des dispositifs de forages, fabrication des éléments du puits et dispositifs de mise en place ;
  • conception d’éléments pour circulation du fluide caloporteur, entretien, connexion entre puits ;
  • choix d’un schéma d’exploitation (nombre de puits en série), de réchauffement à 135°C de l’eau du déstockage quand elle sort à T < 135°C ;
  • pour les différentes natures de sols, il faudrait examiner avec le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) comment se prémunir des circulations d’eau au travers du volume de stockage ;
  • expérimenter un SSC couplé à un réseau de chaleur proche d’une source de chaleur fatale telle qu’un incinérateur d’ordures ménagères par exemple.

4.4. Résumé et conclusions sur la thermique du SSC proposé

S’agissant du fonctionnement du SSC, le stockage est vidé complètement chaque année et les opérations de stockage ou déstockage sont alors reproductibles année après année. Ce point est très important pour le fonctionnement pérenne du SSC. Pour cela il est nécessaire d’utiliser, lors de la phase de déstockage, une vitesse maximale de déstockage, compatible avec la demande de chaleur. En fin de déstockage, l’eau qui sort du stockage est à une température inférieure à la température de référence (choisie ici à 135°C) mais elle peut être réchauffée à 135°C par les chaudières.

S’agissant des efficacités de stockage d’un SSC, on conclut que le stockage est efficace :

  • à environ 80 % de sa capacité nominale pour un entre-axe puits de 3,6 m, soit pour 500 000 hab. # 18 000  puits  de  h=100m ;
  • à environ 70 % de sa capacité nominale pour un entre-axe puits = 4,8 m, soit pour 500 000 hab. # 10 000 puits h=100m 0,5 E6 hab ;
  • les nombres de puits ci-dessus tiennent compte de cet effet d’efficacité.

S’agissant de l’emprise au sol du SSC pour un demi-million d’habitants, environ 20 hectares ou 200 000 m2 pour une profondeur utile de puits de 100 m.

20 ha = 447m x 447m  à  0,4 m2 / habitant* 500 0000 habitants

Enfin les pertes thermiques annuelles par les parois du volume de stockage dépendent de la taille de ce volume. Elles sont inférieures à 5% après quelques années si le volume de stockage est tel qu’il dépasse la capacité nécessaire à 50 000 habitants.

Cette étude par simulation parait très encourageante pour la faisabilité d’un SSC, bien qu’une vérification expérimentale s’impose car les mécanismes de transfert de chaleur s’avèrent complexes à prendre en compte de façon complète et précise dans la simulation.

Il apparait cependant assez clairement que la faisabilité d’un SCC dans un sol granitique homogène est hautement probable. Les matériaux assurant le confinement de l’eau ou du caloporteur qui circule dans les puits doivent cependant être bien choisis notamment pour leur tenue mécanique dans le temps car ils sont soumis à de fortes variations cycliques de température. Pour les terrains, sédimentaires en particulier, il y a lieu aussi de se prémunir des nappes d’eau souterraines qui pourraient traverser le volume du stockage, ce qui est réalisé notamment lors de la construction de tunnels routiers ou ferroviaires.

 

5. Conclusion générale

Un usage intensif de la cogénération de chaleur-électricité pour le chauffage et ECS de l’habitat- tertiaire grâce à un SSC, apparait clairement possible pour ce qui concerne la thermique. Cette assertion repose sur le fait que la thermique du procédé utilisé pour le SSC apparait comme étant bien comprise et sous contrôle. Le dimensionnement du SSC est clairement explicité et sa taille, qui est impressionnante, est cependant à mettre en relation avec l’importance de l’agglomération choisie ou le nombre d’habitants desservis.

Son mode d’utilisation apparait aussi comme bien optimisé, notamment pour ce qui concerne la pérennité de fonctionnement d’une telle installation avec les idées importantes d’extraire toute la chaleur stockée et d’utiliser la chaleur issue de chaudières pour réchauffer jusqu’à 135°C le caloporteur qui sort du volume de stockage à T < 135°C en fin de déstockage.

Une estimation du coût d’un tel stockage, basée sur le cout unitaire d’un puits équipé et raccordé, donne une valeur de l’investissement de 10 000 €/puits raccordé. Si on considère que l’amortissement annuel sur 30 ans, augmenté du coût de fonctionnement, est de 1000 €/an-puits, le coût du stockage est estimé à 33€/MWh-effectivement stocké. Si on répartit ce coût du stockage sur l’ensemble des MWh issus de cogénération, le coût de stockage devient 9,5 €/MWh-chal.cog. Ce coût est  plutôt modeste eu égard aux optimisations qu’il permet en termes d’investissements et de fonctionnement de la centrale électrique et en termes de transport par caloduc. S’il s’avère que la valeur de l’entraxe des puits peut être porté de 3,6 m à 4,8 m, alors le même calcul conduit à un coût de stockage proche de 5 €/MWh-chal. cog. On voit donc que le coût d’un SSC est loin d’être dissuasif et qu’il est envisageable de faire un usage intensif de chaleur de cogénération au niveau national et de réduire ainsi de façon significative la facture énergétique et les émissions de CO2.

Une toute première estimation des coûts (achat de chaleur de cogénération, investissement et fonctionnement pour le transport sur 100 Km par caloduc et pour le  réseau de chaleur avec SSC montre que cette démarche est économiquement attractive. Elle peut donc constituer une alternative intéressante à la réduction par quatre des consommations pour le chauffage de tout l’habitat. Ce facteur 4, qui parait difficile à garantir, va en effet réduire le confort de l’habitat (moins de surfaces vitrées) et renchérir notablement le coût des logements et de leur d’entretien.

Enfin, on remarquera que le choix d’un mix énergétique de 70% de chaleur de cogénération et 30 % de chaleur issue de chaudières n’est pas forcément optimal. En effet, la possibilité de moduler rapidement la vitesse de déstockage pour faire face à des pointes de consommations pourrait conduire à ne choisir que 20 % de chaleur soient issus de chaudières contre 80% de chaleur issus de cogénération. Il serait alors nécessaire de stocker 30% de la chaleur consommée annuellement.

In fine, il parait possible de conclure que le stockage saisonnier de chaleur est techniquement réalisable et qu’il permet un usage bien optimisé de la chaleur de cogénération pour un coût abordable, en remarquant par ailleurs que pour les centrales électriques avec cogénération, le rendement énergétique approche les 100%. On peut estimer qu’au niveau national, 200 TWh de chaleur de cogénération pourraient être utilisés.

 


Bibliographie complémentaire

Étude réalisée par un groupe d’ingénieurs  et physiciens : J-L. Belmont, M. Fruneau, M. Lieuvin, J-C. Ravel  et J-M. Loiseaux ayant exercé au LPSC CNRS Grenoble et avec le concours de S. Xin, R. Knikker du Cethyl  de Lyon et le support du Programme Énergie du CNRS. Contact : jeanmarie.loiseaux@numericable.fr

Loiseaux Jean-Marie (2013). Comment rendre utilisables les chaleurs fatales ou de cogénération? Communication au meeting  « Sobriété et efficacité énergétiques ». Université de Technologie de Belfort-Montbéliard et Académie des Technologies, 28 Novembre 2013 jeanmarie.loiseaux@numericable.fr

Electrical Power and Energy Systems 42 (2012) pp. 553–559 par H. Safa CEA, DEN, Scientific Direction, CEA Saclay, 91191 Gif-sur-Yvette

 


L’Encyclopédie de l’Énergie est publiée par l’Association des Encyclopédies de l’Environnement et de l’Énergie (www.a3e.fr), contractuellement liée à l’université Grenoble Alpes et à Grenoble INP, et parrainée par l’Académie des sciences.

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